mercredi 14 octobre 2015


La libellule


Charles est livreur d’appareils électroménagers. Des années qu’il parcourt le même secteur, aux alentours de Toulouse. Chaque matin, il enfile le blouson rouge et jaune aux couleurs de la marque. Au début, il n’était pas très à l’aise avec ces tons vifs, lui c’était plutôt des bruns, gris, discrets qui lui convenaient. Et puis il s’y est habitué. Avec le temps…
Son visage a changé, il est devenu d’une infini banalité. Chaque fois qu’il se présente à un nouveau client, celui ci lui dit: vous me rappelez untel où untel…Il est tout le monde, où personne. Il livre.
A douze heures trente, Charles s’est arrêté au bord de ce ruisseau pour manger son jambon gruyère sans beurre préparé à la hâte à six heures ce matin. C’est curieux, jamais il n’était passé par là. Pourtant toutes ces routes, ces chemins, il les connait par coeur. Mais là, non. Il est quatorze heures. Il a ôté son blouson, ses chaussures et les pieds dans l’eau il observe cette libellule. Il ne bouge plus, il regarde. Il a déjà raté son premier rendez vous de l’après midi. Quinze heures, il est toujours là, il a juste changé de position pour ne pas s’ankyloser. Son estomac gargouille, il frissonne, ses muscles se dénouent, les senteurs se font plus précises et son oeil lui semble d’une acuité extraordinaire. la libellule s’est envolé pour se poser un peu plus loin, une autre est venue, d’herbe en herbe, jusqu’à lui. Ce soir, il rend la camionnette et la tenue qui va avec…

2 commentaires:

  1. ou comment trouver la légèreté d'être.
    (rien à voir avec l'absence de beurre dans...)

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  2. J'aime vraiment cette façon que tu as de raconter des histoires simples et le tendre regard que tu portes sur les chose et les gens.

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