Au palais des papes
(Avignon, Vaucluse, 30 décembre)
Une feuille en suspension devant le palais des papes.
Une feuille découpée, papier ou matière synthétique.
Les fils tendus d’un édifice à l’autre sont invisibles.
Rien d’autre dans le ciel.
Au pied des murailles un saxophoniste joue.
« Laura », Charlie Parker, Bird.
Nous sortons de l’exposition Ernest Pignon Ernest.
Âmes déchirées sur les murs délabrés.
Rimbaud, Pasolini, Mahmoud Darwich, Maïakovski, d’autres anonymes.
Homme errant, homme en lutte, homme expulsé, homme martyrisé.
Femme qui veille, femme qui porte sa terre sur le visage, Naples ou Martigues.
Âmes au bout du crayon offertes aux passant.
Geste d’une force inouïe. Pour l’amour.
Fusain, pierre noire, lavis, encre. Contre l’indifférence.
Nous sortons du palais des papes chargés de la puissance de l’artiste.
Ciel bleu, Bird, âmes en suspension, pierres au soleil, papiers froissés,
pour jurer fidélité à l’humanité.
( Ernest Pignon Ernest, Derrière la vitre, photographie, sérigraphie en situation, Lyon, 96-97, exposition Avignon Palais des papes)