Exploratrice
(Saint-Pantaléon-de-Lapleau, Corrèze, 6 août, 13h 55)
J’ai cinq ans et demi.
Je m’appelle Nina.
Hier je suis parti en exploration.
J’aime bien explorer.
Quand je serai grande je serai exploratrice…ou trapéziste.
J’ai pris un bout de pain, une vache qui rit, une pomme, ma gourde en plastique, celle que je prends pour l’école, et j’ai tout mis dans mon sac à dos rose que je prends quand on part en voyage ou en ballade avec papa et maman.
Je suis partie vers la forêt. Le chien de la voisine me suivait. C’est un gentil chien, tout noir.
Le chemin était joli. Il y avait des pierres avec de la mousse.
Ça doit être bien de dormir sur la mousse.
Je parlais à Catherine. C’est ma copine pour quand j’explore. Je l’ai inventée. Des fois j’en invente d’autres, des copains aussi, pour le soir. J’aime pas trop le soir.
À un moment les arbres étaient plus serrés. Il faisait un petit peu noir sur le chemin.
J’ai arrêté de parler à Catherine.
Et puis il y a eu un arbre avec plein de bras levés au ciel.
Non, mais qu’est ce que tu fais là, si loin de la maison! Il a dit.
Oui, c’est vrai, il a dit ça.
J’avais un petit peu peur, mais ça, il faut pas le répéter.
Alors je suis rentrée.
Le chien, il était déjà parti.
Il faisait plus froid, plus noir.
Et puis il y a eu deux chemins. Je savais pas lequel allait à la maison.
Il y a une petite larme, une toute petite hein, qui est arrivée dans mes yeux.
Et puis , il y a papa qui est arrivé. Il courait. Il m’a prise dans ses bras.
Nina, ça fait deux heures qu’on te cherche! Il a dit.
Il me serrait fort. Sa voix tremblait un peu.
Il était content, mais il était aussi un peu en colère.
Maintenant je sais que la peur peut mettre en colère.
Je sais beaucoup d’autres choses qu’on ne sait pas à mon âge.
J’ai raconté à papa l’arbre avec les bras en l’air.
Aujourd’hui on est revenu le voir tous les deux.
Papa m’a dit que les arbres veillent sur nous, alors il faut veiller sur eux.
Ça, je le savais pas.