vendredi 30 septembre 2022


Dans l'ombre des cyprès

( Rose trémière, Travaillan, 13 juillet, 17h 55)

La taille ceinte de son voile froissé

Une femme se dresse dans le noir

jeudi 29 septembre 2022


Les berges du périphérique


(Vue du périphérique extérieur, Paris, Porte de Versailles, 18h 35)


Bloqué  dans les embouteillages j’aperçois tout en haut d’un hôtel un homme seul sur une terrasse auprès d’un arbre. Un oiseau?

Depuis la terrasse de son hôtel, l’homme regarde tout en bas, sur le boulevard périphérique le défilé ininterrompu des voitures dont les pare-brise et carrosseries pris dans la lumière de fin d’après-midi lancent des éclats. Un banc de poissons?

mercredi 28 septembre 2022


Une caresse

(Jardin de L’Hotel de Sully, Paris 4ième, 16 septembre, 18h 55)

Un souvenir, une caresse

L’ombre des feuilles danse

Sur le bois coupé, poncé, raboté

 

mardi 27 septembre 2022


Trimer et rêver

(Hendaye, 27 juillet, 21h 20)

Il a plié la dernière chaise. Seul sur la plage, il allume une cigarette. Il aspire lentement et la fumée descend. Et le bruit des vagues accompagne la douceur du tabac. Il a roulé les toiles, une à une.

Il contemple les piquets alignés. Sur le sable fin s’échappe les secrets des alcôves. Le sable est frais sous ses pieds nus. il a roulé les toiles, les a portées sur son épaule, jusqu’à la cabane sur pilotis. Chaque soir les mêmes gestes. Et le matin, porter, dérouler, placer deux transats devant chaque tente, les mêmes gestes. Petit boulot de saison. Ça lui convient. Parfois il s’assoit sur une chaise longue qu’il vient d’installer et reste là un instant s’imaginant en bonne compagnie. C’est une chose qu’il sait bien faire, rêver. Trimer et rêver, ça lui convient.

lundi 26 septembre 2022


Le soleil

(Col de la Croix de Bor, D 59, Lozère, 19 juillet, 21h)

En Iran, en Afghanistan, au Yemen, en Ethiopie, au Mali, au Burkina, en Ukraine…

Ne ne les  laissons pas manger le soleil ! 

dimanche 25 septembre 2022


Miniatures éphémères

(Travaillan, 12 juillet, 20h 20)

Sur le chemin des caragouilles 

samedi 24 septembre 2022


Celui qui essaye de se souvenir

(Plage de Sciotot, les pieux, 31 mai, 16h 50)

C’était en fin d’après-midi, sur une plage paisible.

L’homme était assis, adossé au reste d’un mur, jambes tendus devant lui, les deux mains à plat sur les galets, le menton sur la poitrine, silhouette abandonnée, comme un combattant laissé pour mort après la bataille, héros d’un western du bout du monde où le fracas des vagues et du vent couvre les coups de feu.

Je me suis approché. 

Au son des galets roulant sous mes pas, l’homme a relevé la tête lentement et m’a regardé fixement.

Ça va? lui ai-je demandé.

Très bien, merci… J’essaye de me souvenir, m’a-t-il dit. 

vendredi 23 septembre 2022


Au bout du quai

(Puteaux, Hauts-de-Seine, 7h 20)

7h, gare de Puteaux, Ligne L.

Le jour se lève.

Au bout du quai, un guerrier de fer monte la garde.

Au delà des barrières, dans les terrains vagues le long des voies, grouille la vie sauvage.

Rats géants et félins aux griffes acérées attendent tapis dans les buissons.

Le rêve du Douanier Rousseau obsède le voyageur encagé. 

jeudi 22 septembre 2022


Paris, 7h 30

(Plage de Sciotot, Les Pieux, Manche, 31 mai, 16h 10)

Paris, 7h 30.

À contre-temps des pas pressés et des têtes baissées, j’ouvre un livre dans le métro brinquebalant, un polar, un roman noir, Tijuana Straits de Kem Nunn, je file à la frontière mexicaine, sur le pacifique, en compagnie d’un surfeur sous amphétamines qui élève des lombrics à compost. À la station Pyramides, une phrase me claque à la gueule, une phrase extraite d’un poème de William Blake, Auguries of Innocence, tel que cité dans le film de Jim Jarmush, Dead Man, note le traducteur: Certains naissent pour le délice exquis, certains pour la nuit infinie.

mercredi 21 septembre 2022


Le rouge gorge

(Vaucresson, 17h 30)

Je nettoie le jardin, délaissé depuis quelques semaines.

Tondre, ratisser, ramasser feuilles et bois mort, tailler, cueillir quelques fruits, figues et poires.

La terre est dure, trop sèche. Les fruits sont petits, rabougris. L’érable du japon a perdu de sa splendeur, l’hibiscus est couvert de punaises. L’herbe est grillée par endroit, plaques jaunes, pelade que seule une pluie continue de plusieurs jours pourrait guérir.

Le jardin est comme une vieille dame qu’on aurait oublié. Il ne faut pas le brusquer. Il faut l’écouter, lui donner la main, prendre le temps.

Un jeune rouge gorge pépie discrètement, me tourne autour et fait des manières. Il vient très près. À portée de main. 

Cherche-t-il à resserrer les liens entre nous? 

mardi 20 septembre 2022


(Bidart, 9 septembre, 20h 45)

Au bord du jardin, un fauteuil en rotin.

Au bord du jardin, où le bruit de l’océan et du vent se cogne au bruit des familles et des maisons.

Là, les yeux fermés, il dessine à la mine sur du papier ivoire à grain fin.

Il dessine le mouvement. 

lundi 19 septembre 2022


Quelques secondes

(Vaucresson, 14 septembre, 18h 50)

Cela a duré quelques secondes.

Un arbre nuage en regard du séquoia géant.

Quelques secondes avant que le vent du nord n'efface l’image.

Une infinité de mondes superposés et la certitude que le temps n’existe pas. 

dimanche 18 septembre 2022


Miniatures éphémères

(Vaucresson, 17 septembre, 15h 35)

Vagues d’automne 

samedi 17 septembre 2022


Les feuilles

(Vaucresson, 15h)

Les feuilles sèchent, tombent et se déforment.

Je les  entends, comme un feu lointain qui crépite.

Elles disent que rien,  jamais,  ne finit. 

vendredi 16 septembre 2022


Apatride

(Jardin de l’Hotel de Sully, Paris 4ième, 18h 55)

Un vieil arbre contre un vieux mur.

Un coin de désordre dans un jardin bien rangé.

C’est mon pays me dit Juan.

Un pays où l’on se tait.

Juan ressemble à l’arbre.

Le dos de sa veste est marqué de salpêtre.

Apatride pour quelques mots de trop,

Juan s’accroche à ces coins de désordre où l’emporte le vent. 

jeudi 15 septembre 2022


7h Ligne L


(Ligne L, entre Le Val d’Or et La Défense, Hauts-de-Seine, 7h 15)


7h ligne L

Quelqu’un lit un livre 

mercredi 14 septembre 2022


Merci pour la danse

(Vaucresson, 19h 30)

J’ai cherché la mer par la fenêtre de toit.

Pour vérifier. 

Il m’arrive de me réveiller me croyant ailleurs.

Il y avait des arbres, il y avait des immeubles et des maisons, mais pas la mer.

Il y avait aussi un gars, accroché à l’antenne hertzienne.


Je suis venu réparer la porte m’a-t-il dit.

Mais là, vous êtes sur le toit…

Je sais, mais j’avais mal à la tête, quand c’est comme ça il faut que je prenne de l’altitude.

Et la porte?

C’est fait.

Ah bon, je ne vous ai pas vu.

Je suis rapide et discret.

Faites attention à l’antenne quand-même

Ne vous inquiétez pas, j’ai l’habitude.

La nuit dernière le vent a soufflé si fort, vous auriez été sur le toit que vous auriez été emporté.

Comment ça, ici le vent a soufflé?

Oui.

Pas chez moi.

Vous habitez où?

Pas loin, à Bougival.

C’est curieux. Ça tapait dans les volets, ça tapait fort.

Mais il n’y a pas de volets ici!

C’est vrai , vous avez raison… Et la porte, elle marche maintenant?

Oui, j’ai changé les gonds et recalé la vitre.

Parfait, merci…. Et votre tête, ça va mieux?

Ça cogne encore, c’est les volets qui tapent….Excusez moi, je suis taquin…

Non, ce n’est pas grave, ce devait être les volets du voisin.

C’est étrange ces maux de têtes, les médecins ne comprennent pas. Le radiologue a dit qu’il n’avait jamais vu ça, un foutoir pareil, un cas extraordinaire, il se demandait comment je vivais, je lui ai dit que ça allait sauf quand ça cognait, qu’il fallait que je grimpe c’est tout. Alors il m’a dit grimpez, si ça vous fait du bien, moi je n’y comprends rien, votre intérieur ne ressemble à rien de connu.

Si vous voulez monter plus haut, il y a le grand séquoia, dans le parc, là-bas.

Merci, mais il faudrait d’abord que je redescende du toit. Je préfère attendre ici.

Voulez-vous que je vous apporte quelque chose, un café, un verre d’eau…?

Non merci, c’est gentil.

Bon, alors je vous laisse. Si vous avez besoin de quoi que ce soit, vous tapez au carreau.

Merci, merci pour la danse.


Je l’ai salué, je suis allé vérifier la porte en bas, elle était effectivement réparée, du bon boulot.

Je repensais à sa dernière phrase, le titre d’une chanson de Léonard Cohen. Je réalisai alors que sa voix qui m’avait semblé familière tout le long de notre conversation était identique à celle du chanteur.

Dans le salon, sur la platine vinyl, le disque Thanks for the dance tournait encore, le bras en bout de piste.

Étais-je éveillé? Étais-je là où je pensais être?

Alors je me suis couché.

Pour vérifier.



 

mardi 13 septembre 2022


Lune à balancer

(Hendaye, 10 septembre, 22h)

Lune pleine

Lune à balancer

Les embruns ont un goût de rhum

Les chats miaulent à la lune

Bataillent dans les rochers

Rick a le pas dominical

Il dévisage la nuit

Se souvient d’un regard

De la scie des cigales tropicales

D’une langue inconnue

Où chaque mot veut dire

Je t’aime 

lundi 12 septembre 2022


26° au lever du jour

(Hendaye, 7h 55)

12 septembre

26° au lever du jour

L’océan immobile

Pas la moindre ondulation

Un vent léger

Du sud

Bientôt

Le sable du désert

À 16h, 36°

Des silhouettes dans l’eau

Éparpillées le long de la plage

Immobiles

Immergées jusqu’à la taille

Pas la moindre nage

Elles attendent 

dimanche 11 septembre 2022


Miniatures éphémères

(Au pied du Jaïzkibel, 1er septembre, 15h)

Où sont passés les Troglodytes...


samedi 10 septembre 2022


Le long des ganivelles

(Hendaye, 31août, 18h)

Je regardais les lignes grises des clôtures qui protègent les dunes. 

Je l’ai aperçue de dos.

Une longue silhouette.

Un chignon de cheveux blonds.

Une robe fleurie, rouge et bleue, jusqu’aux chevilles.

Pieds nus.

Elle tenait des lambeaux de tissus.

Elle marchait droit sur le sable, le long des ganivelles.

Très près.

Parfois elle s’arrêtait, accrochait un morceau d’étoffe à la clôture.

Jusqu’à la mer.

Aux derniers piquets de bois, elle a défait son chignon, et laissé là sur le fil de fer sa barrette. 

Ses cheveux étaient longs, très longs.

C’était marée haute.

Encore quelques pas avant de toucher l’eau.

Elle prenait soin de laisser une empreinte profonde dans le sable.

Elle s’est immobilisée, a semblé tendre l’oreille.

Une vague un peu plus puissante est arrivée à ses pieds.

Elle a fait trois pas en arrière, dans la ligne de ses pas, puis a ôté sa robe.

Sa robe rouge et bleue sur le sable.

Elle est revenue au bord, où l’on entend un léger grésillement quand la mer se retire.

Elle s’est assise.

Elle a attendu que la mer recouvre ses jambes.

Elle a ri.

Elle s’est relevée, s’est retournée pour revenir sur ses pas.

Elle était sans regard, les yeux  cousus. 

vendredi 9 septembre 2022


L'homme qui marche

(Hendaye, 7h 50)

Un effondrement

Un pan de falaise qui dégringole

Un amas de roches cassées net

Tandis que dansent dans le vent

Les herbes plumeaux

Ce qu’il reste de fantaisie

Au paysage bousculé

C’est dans le creux des falaises

Au bout de la plage

Et l’homme qui marche

Qui vient de là-bas

Étonné 

Pourquoi maintenant

Ces  rochers éclatés

Résonnent encore

Un désir

Ou une inquiétude

Et la longueur de la plage

Pour y réfléchir

 

jeudi 8 septembre 2022


Une armée en campagne

(Hendaye, 9h 35)

Marée basse

La houle va grossir

Dans quelques heures

À l’horizon les nuages

Une armée en campagne

Une chevauchée sauvage

Et l’homme qui marche

Tranquille

Dans la lumière du matin 

mercredi 7 septembre 2022


Cheveux blancs

(Algues blanches dans une flaque au pied du Jaïzkibel à marée basse, 1er septembre, 13h 50)

Notre mère la terre se fait des cheveux blancs 

mardi 6 septembre 2022


Nature morte

(Hendaye, 31 août, 17h 40)

C’est une image sans histoire

Une nature morte

Pourtant l’escargot n’est pas mort

Il attend

Les graines aussi

Attendent d’être emportées

Vie silencieuse, nature reposée

Dit-on aussi

C’est une histoire qui attend 

lundi 5 septembre 2022

 

(Hendaye, 4 septembre, 7h 50)

Une pincée d’or et de curcuma dans le regard du chien

dimanche 4 septembre 2022


Miniatures éphémères

(Au pied du Jaizkibel, 1er septembre, 14h 50)

Le chant des paramoudras 

samedi 3 septembre 2022


Un baiser d'ivresse

(Hendaye, 2 septembre, 8h15)

L’océan est comme une toile cirée

Il pleut à l’envers

Et le ciel aspire la mer

C’est un baiser extraordinaire

Une succion sans retenue

Qui dévoile le dedans des corps

L’océan se laisse faire

Et le ciel se déchaine

C’est un baiser d’ivresse

Dans la noirceur du monde

Tandis qu’à l’écart

Un enfant regarde 

Par le trou de la serrure

Il apprend 

Des passions du ciel et de la mer 

vendredi 2 septembre 2022


L'oiseau-pierre

(Sur le Jaizkibel, Espagne, 1er septembre, 13h 20)

L ‘eau et le vent font leur travail

La pierre devient oiseau

L’oiseau nous regarde

De son œil noir

Laissez faire le temps dit-il

Un jour je volerai 

jeudi 1 septembre 2022


Ce qui est précieux

(Sur le Jaizkibel, Espagne, 13h 05)

Ici l’herbe est encore verte.

L’air est chargé du parfum des brebis, des pottoks, des pins, des fougères et de la bruyère.

Je viens là pour ce qui est précieux.

Je descends la pente vers la mer. Je m’invente des chevauchées sauvages.

J’ai vu récemment un film magnifique, Costa Brava Lebanon. Une famille libanaise ayant fuit Beyrouth vit paisiblement dans une vallée tranquille jusqu’au jour où l’on vient installer une gigantesque décharge à deux pas de chez eux.

La plus jeune, une incroyable gamine, souvent ferme les yeux et compte à voix haute pour que n’arrive pas ce qui doit arriver.

Je vois encore son visage, ses yeux immenses. Elle s'appelle Rim.

Et je compte avec elle. 



(13h 15)