dimanche 31 juillet 2022

samedi 30 juillet 2022


Shalom Aleichem

(Hendaye, 21h 20)

Le ciel bégaye, la falaise rougeoie

Je décline le motif d’un coin d’enfance

Dans l’oreille le Shalom Aleichem

Chanté hier soir à Marciac par le contrebassiste Avishai Cohen

Repris en chœur par une salle enthousiaste et unie

À en serrer le cœur. 

vendredi 29 juillet 2022


Les baigneuses

(Hendaye, 28 juillet, 21h 05)

Elles ont attendu le soir

Elles ont laissé les maris sur le bord

Il leur fallait la plage toute entière

Pour elles toutes seules

Elles ont papoté jusqu’à l’eau

La vie, les enfants, les maladies

Les joies et les peines

La charge mentale dit-on

Elles ont dansé, un peu

Et puis elles ont nagé, nagé… 

jeudi 28 juillet 2022


Carte postale

(Hendaye, 21h 20)

C’est un ciel de carte postale.

Quelques lignes écrites à la plume de l’oiseau.

Ce que l’on veut.

Madame, il va pleuvoir demain, il fera plus frais, je serais là pour vous réchauffer.

Ou

Mamie, ici il n’y a pas la guerre, on va à la mer tous les jours. Le chat a mangé l’oiseau, j’ai gardé les plumes.

Ou

Mon amour, la plage est immense, tu me manques.

Ou

Tonton, j’ai pêché un poisson, il était pas bon, je l’ai mangé quand même, c’est moi qui l’ai pêché.

Ou

Cher ami, avez vous remarqué combien le temps court le jour puis soudain ralentit au crépuscule?

Ou

Papa, j’espère que tu n’as pas trop chaud au bureau. Hier j’ai nagé où j’ai pas pied.

Ou

Pépé, maman a dit qu’on viendrait te voir bientôt. On a mangé des beignets abricot.

Ou

Monsieur le président, regardez comme c’est beau. Si vous arrêtiez un peu vos conneries.

Ou

Salut toi, pas le temps de regarder le ciel. Je n’ai plus de jambes mais des pourboires plein les poches.

Ou

Papa, hier j’ai vu un homme qui avait fait un grand dragon de sable, très beau. Il avait mis des bougies tout autour et une boite pour les pièces. Est-ce-que c’est un métier?

Ou

Petite sœur, hier j’ai rencontré un surfeur. Ce soir on a rendez vous au bout de la plage.

Ou

Chers amis, nous sommes bien arrivés, le chien aboie, la caravane passe.

Ou

 

mercredi 27 juillet 2022


Pinpin

(Hendaye, 21h 05)

Il y a un coin pour les solitaires au bout de la plage.

Le soir on n’y croise pas grand monde.

On entend quelques barques qui remontent le chenal vers le port.

Protégés par les ganivelles, Queues de lièvre, Chardons, Immortelles et Lys maritimes

apaisent le regard de celui qui a trop regardé la mer.

Ce soir je m’égare dans un champ de Queues de lièvre, le Lagure ovale, que l’on nomme aussi Gros-minet, Doudou, ou Pinpin.

Je m’égare dans un champ de Pinpin pour ne pas penser.

J'ai déjà parlé ici du Bout de la plage (Post du 17 juillet 2018) et j'en reparlerai sûrement encore...


mardi 26 juillet 2022


Entrelacs

C'est son nom 

(Hendaye, 21h )

Quand il suit les escargots il ne va pas bien vite

Quand il suit les oiseaux il file à toute allure

Quand il suit quelqu’un il marche pareil

Si l’homme boite il boite, si l’homme danse il danse

Il entre, il sort, sans savoir, juste pour voir

Il a su dire bonjour avant de savoir dire son nom

Il dit qu’il a les yeux bleus parce  qu’il y a la mer dedans

Il accroche des bouts de ficelles aux branches

Ou aux poignées de portes, pour ne pas se perdre

Quand il est amoureux il peut rester longtemps sans bouger

Très longtemps

lundi 25 juillet 2022

 


(Hendaye, 8h 45)

J’ai longtemps attendu que le ciel tombe

Il n’est pas tombé

dimanche 24 juillet 2022

samedi 23 juillet 2022

 

Sous la terre

(Aubazine, Corrèze, 20 novembre 2021, 10h 35)

Je chemine dans la montagne, sur une route très ancienne.

Soudain passe un troupeaux de chevaux sauvages.

La terre résonne sous les sabots. La terre est creuse.

Les chevaux sont passés et la terre sonne encore.

On frappe sous la terre, quelqu’un veut sortir.

Ou simplement échanger quelques mots.

vendredi 22 juillet 2022


Des nouvelles

(Trévignon, Finistère, 1er juillet, 19h 05)

Au phare de Trévignon trois silhouettes figées sur les rochers dans l’éclatante beauté du paysage attendent des nouvelles.

Un oiseau s’approche et s’en va sans même se poser.

Les trois hommes soupirent. Il faut encore attendre.

Ils savent que les nouvelles ne seront pas bonnes, mais ils verront l’oiseau se poser, ils verront ses ailes lentement se replier, ils entendront ses petits coups de bec,  le bruit de ses pattes sur la pierre, puis ils verront ses ailes à nouveau se déployer. 

jeudi 21 juillet 2022


La fleur, la pierre et l'âne

(Col de la Croix de Bor, Lozère, 19 juillet, 19h 25)

Il venait de loin, il tenait un âne par la bride.

C’était un poète cheminant dans la montagne, en compagnie d’un âne bâté chargé de livres et de cahiers.

L’homme s’extasiait de tout, disait ses vers à son âne, avant de les noter sur un cahier à la halte du soir.

Au col de la Croix de Bor, il y avait une fleur et une pierre à l’entrée d’un chemin de lumière.

L’homme s’est assis sur la pierre, a posé la main sur la pierre. 

iI a répété plusieurs fois le mot pierre, puis le mot fleur, la fleur et la pierre, plusieurs fois.

Il sentait la pierre rugueuse sous sa paume, il voyait la fleur dans le sillon de soleil, quelque chose venait, il allait parler, l’âne soufflait doucement…

Alors l’âne a mangé la fleur et a pissé sur la pierre, un gros jet jaune qui éclaboussait. 

mercredi 20 juillet 2022


La Route qui parle de nous 

(Entre Le Jolan et Notre-Dame-de-Valentine, Cantal, 12h 20)

C’est un paysage à galoper sur une route qui n’a pas de nom.

Un panneau, Notre-Dame-de-Valentine.

Valentine, c’est aussi le nom d’un village de Haute-Garonne dont ma mère parle très souvent, mon grand-père y est enterré.

Alors nous avons pris la route de Notre-Dame-de-Valentine, une route étroite qui n’a pas de nom et se finit en cul de sac sur une chapelle de pierre au sommet d’un piton rocheux.

Dans la chapelle, il y avait un vieil homme assis sur un banc de bois. Les mêmes dents en avant, la même moustache que mon oncle Pierre dont ma mère parle si souvent, un homme que j’ai tant aimé.

Sur ce plateau, le vent semble y habiter, les vaches ont une magnifique robe brune et des cornes impressionnantes, les framboises sauvages pullulent dans les talus.

Et il y a cette petite route que je nommerais désormais, la Route qui parle de nous.

mardi 19 juillet 2022


Le col de la Croix de Bor

(Col de la Croix de Bor, D 59, Lozère, 21h)

D’un festival à un autre nous repassons par la montagne.

Nous venions de passer le col des Trois Sœurs, j’attendais celui de la Cerisaie, ce fut celui de la Croix de Bor.

Une femme qui chargeait son foin nous a dit: Vous serez bien là-haut pour passer la nuit.

Elle avait le visage rouge et le sourire large comme ses hanches.

Oui, c’est vrai, on est bien là-haut. 

Le ciel change, il n’est plus aussi lisse que ces derniers jours. Il fait moins chaud.

Hier j’ai entendu un homme au nez cassé, un peu éméché, dire à une femme au visage froissé, assise à ses côtés sur une marche de pierre: Tes joues sont douces, tes seins sont doux, tes mains sont douces, avec toi la vie est douce….

Le soleil descend. On est bien là-haut. 

lundi 18 juillet 2022


Caragouille

(Travaillan, 16 juillet, 17h 30)

Petit blancs de Provence, escargots des steppes, caragouilles rosées,

Ils fuient la terre trop chaude, grimpent aux herbes pour un peu d’humidité nocturne,

Et je tourne en rond dans le pré des caragouilles

Tandis que le feu prend des Monts d’Arrée à Barbentane en passant par la Teste-de-Buch,

Je tourne en rond dans le pré des caragouilles

Je deviens caragouille, petit blanc de Provence, escargot des steppes,

Et je m’étonne de tant de beauté au bord du précipice 

dimanche 17 juillet 2022

samedi 16 juillet 2022


Rêverie

(Travaillan, 11h )

Le navire sur la lune

La lune sur la tête 

vendredi 15 juillet 2022


Pleine lune 

(Travaillan, 13 juillet,18h40)

Pleine lune dans les hautes herbes

l’amoureuse lovée au creux du lit

L’amoureux assis au bord du lit

jeudi 14 juillet 2022


Incendie

(Avignon, 19h 30)

Le festival d’Avignon bat son plein, les murs dégueulent d’affiches, au sud la forêt brûle. Je bois un verre avec un ami qui me parle de sa fille terrorisée par l’avenir. Des cendres tombent lentement sur la ville, les yeux piquent, la gorge gratte, la table noircit et la roue tourne. 

mercredi 13 juillet 2022


Canon en ré majeur de Johann Pachelbel

(La rose trémière) 

(RoseTrémière, Travaillan, 19h)

Lampion de papier froissé d’un 14 juillet caniculaire

Anémone de mer au creux de l’oreille

La mer est-elle venue jusqu’ici?

Sombres flétrissures, veines et rides creusées par le vent

Au crépuscule la fleur lance son dernier chant

La terre se craquelle, les grenouilles se dessèchent

La rivière est à sec, pas même une flaque

Les insectes se font rares

Une sauterelle, un couple de charançons

Et quelques mouches

Je n’ai rien vu d’autre aujourd’hui

La peau de la vieille dame pend sous ses bras

Le vieux tient sa vieille par  la main

Le puit est à sec

Les yeux des vieux sont à sec

La fleur lance sont dernier chant

C’est un canon en ré majeur


mardi 12 juillet 2022


Arrondir les angles

 (Travaillan, Vaucluse, 20h15)

J’ai connu un diplomate qui avait passé sa vie à arrondir les angles.

Dans ses dernières volontés il demanda que son cercueil fût circulaire.

Son souhait fut exhaussé. Seulement ce format se révéla incompatible avec le caveau familial.

Un second caveau, bien rond celui-ci, fut construit à côté du premier.

Il demeura ainsi seul pour l’éternité.

lundi 11 juillet 2022


Trésors

(Huelgoat, Finistère, 2 juillet, 17h)

Or, quartz, trésors

Quelques cailloux au fond de l’eau

Brillent dans le regard du môme

Il plonge vivement sa main

Les cueille, les glisse dans sa poche

Il faut attendre le couchant

Pour que le gisement s’épuise

Alors le môme rentre chez lui

Les poches pleines et trempées 

dimanche 10 juillet 2022


Miniatures éphémères

 (Vaucresson, 5 juillet, 19h)

Rendez-vous 19h à l’Hibiscus

samedi 9 juillet 2022


Ce soir

(Sur la D5 entre Saint-Denis-en-Margeride et La Villedieu, Lozère, 21h 12)

Un trou noir d’incertitude

Une forêt d’arêtes de poisson

Quelques fleurs des montagnes

Et le soleil couchant sur un ciel sans nuages

C’est ici que je vais faire mon lit ce soir 

vendredi 8 juillet 2022


Un secret

(Huelgoat, Finistère, 2 juillet, 16h 30)

La vieille dame était allongée sur son lit, le visage tourné vers la fenêtre, les yeux clos dans la lumière.

L'enfant s’est penché sur son oreille et a murmuré tout bas, prenant garde à ce que personne d’autre n’entende: 

Un jour je serais vieux comme toi. 

jeudi 7 juillet 2022


L'homme qui  danse 

(Kersolf, Finistère, 1er juillet, 14h 30)

Je l’ai vu venir de loin sur le chemin.

Il claudiquait, un bâton pas très droit dans la main.

La ligne de son dos, la taille de ses pas, lui donnaient un grand âge.

Je l’ai vu s’arrêter, planter son bâton, et regarder les nuages.

Il dansait au ralenti épousant les formes dans le ciel.

Les nuages se délitaient, l’homme dansait de plus en plus vite.

Soudain le ciel fut d’un bleu parfait et l’homme s’évapora.

Le bâton était toujours là planté sur le bord du chemin.

À son extrémité, il y avait un bourgeon.

mercredi 6 juillet 2022


La porte était ouverte

(Œdemère Noble sur Chardon, Arborétum de Chèvreloup, 16h)

Il faisait beau. 

La porte était ouverte. 

Monsieur Pierre s’en est allé. 

Sur un chardon il y avait l’éclat vert d’un coléoptère. 

Monsieur Pierre a pensé aux yeux de Danielle. 

Alors il a pris la route de Chatillon. 

Il a suivi les panneaux. 

Et puis il n’y eut plus de panneaux. 

Monsieur Pierre a regardé le ciel. 

Il y avait un petit avion qui bourdonnait. Il volait vers le sud. 

Monsieur Pierre a pensé à son voisin, Eric, le pilote. 

Alors il a suivi l’avion, vers le sud. 

Et puis, l’avion a disparu. 

Alors Monsieur Pierre a suivi le bruit de l’avion. 

Et puis ce fut le silence. 

Monsieur Pierre a regardé le chemin. 

Il y avait sur le talus un papillon sur un bleuet. 

Un Demi Deuil. Monsieur Pierre se souvient des noms des papillons, et des oiseaux. 

Il a pensé aux costumes d’Aristide. 

Alors il a pris la route de Soumagou…. 



(Demi Deuil sur Bleuet, Arborétum de Chèvreloup, 16h 15)


mardi 5 juillet 2022


Rémi

(Hommage ou dessert) 

(Huelgoat, Finistère, 2 juillet,15h 30)

Nous l’avions suivi dans la grotte du diable. Il disait la glotte du diable, car il y entendait ce que personne n’entendait.

lundi 4 juillet 2022


Peter Brook

(Les Bouffes du Nord)

(Vaucresson, 9h)


Un regard bleu intense, espiègle, un bonjour coloré d’un accent anglais au charme indémodable,

au théâtre des Bouffes du Nord Peter Brook saluait tout le monde jusqu’au moindre ouvreur dont il connaissait le prénom.

C’était en 1977, nous avions joué dans ce théâtre  Prends bien garde aux Zeppelins de Didier Flamand. C’était ma première fois. Je n’avais du théâtre qu’une profonde intuition et un désir sauvage. Ma seule formation consistait en cet atelier à la  faculté de Jussieu avec Didier Flamand et Jean Luc Terrade, atelier qui m’a conduit à participer cette année là aux spectacles de Didier(Prends bien garde aux Zeppelins) et Jean-Luc( Select Hotel) aux Bouffes du Nord.

C’était une époque débridée, j’allais où l’on bousculait les conventions. Ce théâtre était le lieu idéal. C’était un théâtre à l’italienne qui était longtemps resté à l’abandon. Peter Brook l’avait investi et gardé quasiment en l’état. L’artifice des ors et rouge velours avait disparu, ne restait que la vie brut que dessinent les peintures écaillées.

Après le spectacle de Didier, j’étais resté travailler dans ce merveilleux théâtre. Durant trois saisons, j’y ai pratiqué tous les petits métiers, ouvreur, caissier, contrôleur, réceptionniste, barman et régisseur plateau.

Nous étions une bande de jeunes comédiens embauchés à l’accueil des spectateurs. Nous refaisions le monde et rêvions à de grands projets sur les marches du théâtre. Jean-Claude Carrière nous avait même un jour proposé une grange de sa maison de campagne comme lieu de répétition.

Chaque soir, je regardais le spectacle jusqu’au bout. J’étais comme un oisillon au bec grand ouvert. Je me souviens de chaque détail D’Ubu Aux Bouffes. Quand je pense à tous les spectacles de Brook que j’ai vus, la première sensation est celle d’une respiration et de l’immensité, de l’espace et de l’âme.

Un soir, c’était pendant la Conférence des Oiseaux, je croise Peter Brook dans le couloir. Il  me demande avec son habituelle délicatesse de lui porter un sandwich et un verre de vin dans son bureau. C’était le moment, en tête à tête, j’allais pouvoir  lui dire toute mon admiration, à quel point l’essence de son théâtre me touchait. Je frappe, j’entre, il était en train de travailler avec quelqu’un. Merci beaucoup Pierre, posez ça là, me dit-il avec cette voix douce et chantante immédiatement identifiable. Bien sûr je n’ai rien osé dire, j’étais bien trop timide et maladroit.

Côtoyer Peter Brook et son équipe durant trois saisons fût sans doute l’une de mes plus belles formations.

Nous étions sur la route, avec Sophie ma compagne quand nous avons appris sa mort.

C’est en 1977 au Bouffes du Nord que j’ai connu Sophie, elle distribuait les programmes au premier étage quand je contrôlais les billets au rez-de-chaussée.

Je dois beaucoup au Théâtre des Bouffes du Nord.

J’entends à la radio dans une rediffusion d’interview, Brook trouvant  le mot « disparition » , concernant le décès de Jean-Claude Carrière, inapproprié. Jean-Claude est toujours présent dit-il, il n’a pas disparu, il s’en est allé, simplement.

Puis parlant du grand âge et de la fin: C’est comme ça.

Bon voyage Monsieur Brook et merci infiniment.


dimanche 3 juillet 2022


Miniatures éphémères

(Scaër, Finistère, 8h 45)

Un dimanche sur la toile 

samedi 2 juillet 2022


La jeune fille dessus la pierre 

(Huelgoat, Finistère, 16h 50)

La jeune fille dessus la pierre

L’eau dessous la pierre

Un murmure, un chant

Des noms égrenés

Au fil de l’eau

vendredi 1 juillet 2022


Rosée du matin 

(Scaër, Finistère, 10h 15)

Quelques gouttes de rosée

Sur une feuille de capucine

Et le chagrin s’évapore