jeudi 30 avril 2020


Deux lames, un tire-bouchon et une coupe de champagne sur un cercueil


(Saint-Jean-du-Maroni, Guyane, 3 avril 2019)


Après quelques verres de Porto je me balance sous le auvent en haut de la colline  au centre de l’abattis. L’humidité fait remonter le parfum du bois brulé. Au-delà, la forêt, partout, nord, sud, est, ouest. Là, le chant des grenouilles et des grillons. J’ai les mains calleuses et la peau moite. Toute la journée à sarcler, tirer les troncs, ôter les pierres. Chacun de mes muscles ce soir se souvient du moindre accident de terrain, des charges trop lourdes et du soleil vertical.
Non, Il faudra attendre encore quelques jours pour s’en aller.
Il n’y a ce soir ni colline, ni grenouilles, il n’y a que le Porto et il fait froid. Saint-Jean-du-Maroni est à environ 7000km. Aujourd’hui nous avons le droit  de circuler dans un rayon de 1km autour de chez nous, dans dix jours ce sera 100 km.
J’ai les ailes qui me démangent. Je met un vieux chapeau et regarde des westerns en sirotant du Porto. Alors je sais que sous les nuages il n’y a pas  que les maisons de Vaucresson, il y a aussi le Maroni et le Colorado.
Depuis quelques jours un souvenir me hante. Le premier couteau offert par ma mère, oui c’est bien ma mère et non mon père qui me fit ce cadeau, c’est elle qui portait l’esprit d’aventure. Ce couteau était un canif à deux lames en inox et un tire bouchon, le manche était de corne grise. J’avais dix ans, lisais Croc Blanc, et le parfum des sous bois s’installait durablement au fond de ma mémoire.
Deux lames et un tire bouchon quand nos libertés sont mises à mal. Voilà où me mènent mes pensées ce soir.
Ce matin nous avons enterré un oncle, un comédien  qui dévorait la vie à pleine bouche.
Nous n’étions qu’une quinzaine, impossible d’être plus nombreux, tous masqués.
Une fois le cercueil en terre nous avons bu une coupe de champagne en son honneur. Nous avions baissés les masques et trinquions  tandis qu’un rayon de soleil effleurait  la tombe toute fraîche. La vie était bien là.
Deux lames, un tire bouchon et une coupe de champagne sur un cercueil, pour nos joies, pour nos colères, pour la liberté.

mercredi 29 avril 2020


Miniatures éphémères


(Vaucresson, 26 mars, 17h 10)

Tentative d’évasion

mardi 28 avril 2020


La visite


 (Vaucresson, 26 avril, 11h 10)

Son dos s’arrondit, son pas ralentit, elle ressemble de plus en plus à un escargot.
Il y a longtemps qu’ils ne se sont pas vus. Son fils, son grand garçon comme elle dit.
Il porte un masque, un masque de tissu fleuri qui lui couvre tout le bas du visage.
Elle ne voit que ses yeux, ça le rajeunit, son petit garçon. Elle se lève, papier froissé qui se déplie avec difficulté. Il se dit qu’il y a six semaines c’était plus facile.
Il porte un petit panier avec un brin de muguet, une tablette de chocolat, et un livre d’aventures. Elle aime beaucoup les livres d’aventures.  Il se dit qu’il aurait pu s’habiller tout en rouge. Elle lui demande si sa chemise est en tissu africain, il y a dessus des mini-cars imprimés semblables aux s’en fout-la-mort sénégalais. C’est au Sénégal qu’elle l’a mis au monde.
Elle met un masque. C’est compliqué, le sonotone se prend dans l’élastique, ses cheveux lui tombe sur les yeux après un mois sans coiffeur, le masque glisse sur le nez, le masque tient chaud, le masque empêche de respirer, bref ça l’emmerde.
Ils descendent marcher un peu, faire le tour de l’immeuble. Des plaques de terre craquelée apparaissent sur les pelouses desséchées. Elle dit que c’est une drôle d’époque, qu'elle a fait son temps. Elle est fatiguée, elle prend son bras. Il s’était dit qu’il garderait  la distance, mais il ne peut refuser son bras.
Après être rentrée, elle se lave scrupuleusement les mains. Lui admire sa discipline et oublie de faire de même.
Ils passent un peu de temps au salon, en respectant la distance réglementaire. On parle peu, on se donne des nouvelles  de la famille, on se demande quand on pourra aller à la mer.
Et puis il y a ces mots croisés, ceux du journal Le Monde, les plus difficiles. Verticalement I « On ne le voit qu’au Vatican et sur les planches ». Elle cale. Elle lui tend le journal, ils se rapprochent, ils cherchent ensemble. Il cale aussi. Il dit qu’il n’a pas la pensée adaptée à ces jeux, il se demande d’ailleurs à quoi est-elle adaptée en ce moment. Ce qui est sûr c’est que la distanciation sociale est plus que compliquée.
Il aimerait prendre sa mère dans ses bras. Pourtant ce n’est pas dans leurs habitudes, c’est une famille à rhizomes, les liens sont souterrains. Mais il aimerait vraiment la prendre dans ses bras. Il ne le fait pas.
Au moment de se quitter, ils se regardent. Des yeux d’escargots qui se tendent.



lundi 27 avril 2020


Le sang de la terre


(Vaucresson, 13 avril, 10h 45)

Le sang de la terre 
à fleur de peau

dimanche 26 avril 2020


Miniatures éphémères
Variations maritimes

 
(Vaucresson, 25 avril, 14h)

La Vague


(Vaucresson, 26 avril, 8h 30)

La Mer Rouge

samedi 25 avril 2020


Azulejos


(Vaucresson, 11h)

Il était un petit homme
sa maison était couverte d’azulejos
on lui a dit de ne plus sortir
l’était trop vieux c’est comme ça
un mois il a tenu 
dans sa maison à carreaux
sans tendresse 
que celle des oiseaux à la fenêtre
et puis il a craqué
s’est tapé la tête contre les murs
la faïence a explosé
comme fleurit le Céanothe
il a tapé si fort
les murs sont tombés
l’a ramassé les éclats bleus
et s‘en est allé les offrir
à une petite dame
qui se desséchait
dans son lit d’hopital


vendredi 24 avril 2020


J'attends le soir


(Vaucresson, 17h 30)

J’attends les hirondelles
ou plutôt non, j’attends la pluie,
non, j’attends le train,
j’attends qu’il siffle,
non, c’est la marée haute que j’attends
ou l’été, l’automne, puis l’hiver,
pourquoi pas la foudre, sur l’Élysée,
en fait j’attends que quelque chose, quelqu’un passe,
une fourmi, un nuage, Godot,
j’attends un baiser,
j’attends le soir.

jeudi 23 avril 2020


Miniatures éphémères
Rêve tropical


(Vaucresson, 10h 20)

La Glycine vient de fleurir, c’est son tour, pas besoin d’autorisation, après le Lilas et les iris, mauves, couleurs du deuil, couleurs quand-même, là-haut les ancêtres  accueillent les nouveaux venus, bonne arrivée au royaume des morts et la trompe sonne et les larmes brillent comme coule la glycine, chaque goutte d’eau pleine de demains, aller et venir des jungles aux déserts, rêver des tropiques sans attestation en équilibre sur l’écorce, la liberté n’a pas de prix, à perdre la raison, aller et venir, d’un monde à l’autre.

mercredi 22 avril 2020


(  Dans une tulipe, Araniella cucurbitina ou araignée courge dévorant un Byturus tomentosus ou coléoptère de la framboise, Vaucresson, 16 avril, 11h 20)

La vie en rose…


mardi 21 avril 2020


Je n'ai fait que ça


(Vaucresson, 4 avril, 8h)


(Vaucresson, 13 avril, 16h 30)


(Vaucresson, 10 avril, 19h)


Le 4 avril j’ai écouté les perruches
le 10 avril j’ai écouté le rouge gorge
le 13 avril  j’ai écouté le vent
le 16 avril j’ai attendu la pluie
hier j’ai écouté mon cœur
aujourd’hui j’ai écouté le cœur de Sophie
ça battait presque pareil
juste un peu plus vite

lundi 20 avril 2020



Miniature éphémère
Pour José, pour Claude
pour leurs compagnes Cathy  et Danièle


(Vaucresson, 17 avril, 12h)

La valse à Margaux ou la petite cantate de Barbara
ou le largo de l’Hiver de Vivaldi,
musiques en cascade le long des larmes d’iris,
je voudrais des mots plus enveloppant
que les bras tenus à distance.
Je n’y arrive pas, ces mots n’existent pas.
Ce n’est pas la mort qui nous blesse,
elle est là depuis toujours,
au premier cri nous la saluons.
Ce qui nous tord le coeur, c’est notre misérable impuissance
quand une épaule tremble sans un bras pour l’étreindre
quand un visage cherche désespérément un baiser avant de s’éteindre.
On écrit, on brasse de l’air, on se parle de loin, c’est mieux que rien.
On se sent con et maladroit,
alors on met fort la musique,
la valse à Margaux, la petite cantate de barbara
ou le largo de l’Hiver de Vivaldi,
on regarde les fleurs et on pleure.

dimanche 19 avril 2020



Miniatures éphémères


(Vaucresson, 18 avril, 14h 45)

« Quand j’aime une fois, j’aime pour toujours »

(Richard Desjardins)

samedi 18 avril 2020


Une île


(Criocère du lys ou lilioceris lilii, Vaucresson, 9 avril, 15h 45)

Mon jardin est une île ceinte de trois murs de meulière attaqués par le lierre et une maison de deux étages.
La mort rôde autour. La mort a toujours rôdé, elle nous suit depuis la naissance logée dans nos ombres. Mais ces temps ci, elle semble plus gourmande, alors nous  ne quittons notre île que pour nous ravitailler.
300 m2. Je l’ai divisée en 300 carrés de  1 m de côté, tous numérotés. Chaque  jour j’explore un ou deux carrés. Quand il y a un arbre dans le périmètre concerné c’est un peu plus compliqué, parfois je grimpe jusqu’à ce que les branches ne supportent plus mon poids, je vois alors au delà des murs et la tentation est grande de m’envoler. Le 25ième jour j’étais dans le néflier sur le carré 13, j’ai sauté, je me suis écrasé dans les primevères. Je dois me satisfaire de ma condition d’homme.
Jamais je n’avais imaginé mon île aussi peuplée, oiseaux, insectes, mulots, chats, certains ne sont que de passage mais beaucoup vivent ici, nous avons le temps de faire connaissance.
Dans le carré 28 j’ai croisé un Liliocéris lilii, on le dit invasif, nuisible. Pourtant il était seul ce jour là, absolument seul, tache rouge comme un nez de clown au milieu de la figure. Il m’a dit venir d’Asie, avoir profité de la mondialisation pour venir jusqu’ici, quelques échanges de lys entre jardiniers d’un bout à l’autre de la terre et le tour est joué. Il m’a promis de se tenir à carreau, conscient de sa solitude, il sentait bien que son histoire de mondialisation n’était pas la bienvenue.  Nous avons sympathisé, j’aime sa couleur. Pendant longtemps ma compagne a porté des lunettes du même rouge, exactement. Voilà, nous sommes devenus amis parce qu’il est tout petit et qu’il me fait penser aux lunettes de Sophie, c’est tout.
Dans le carré 35, c’était un mardi, j’ai  confié mon chagrin à un lyorhissus hyalinus immobile sur l’aigrette d’un pissenlit. Je pensais à mon ami José qui désormais mangeait les pissenlits par la racine, je pensais à José et au rire de sa Cathy, un rire tellement contagieux, plus contagieux encore que ce putain de Covid, sa Cathy sans son José, sa Cathy qu’on ne pouvait même pas prendre dans nos bras. Et si le lyorhissus était une réincarnation apparue sur la tête du pissenlit prêt à s’envoler pour aller chatouiller le nez de Cathy?
Hier, dans le carré 43, j’avais le nez collé depuis déjà un moment sur les fleurs du lilas quand je me suis trouvé face à face avec une punaise diabolique. Elle m’a dit: dégage de mon lilas! Elle brillait au soleil du matin, carapace de samouraï, elle semblait déterminée, têtue comme une bretonne. Je l’ai regardée droit dans les yeux, ses antennes ont tremblé mais elle n’a pas bougé. Je l’ai laissée vivre sa vie de punaise.
Je me suis dit qu’il me faudra une armure de samouraï et une détermination de breton pour le jour où nous pourrons quitter notre île. Il y aura tant à faire!


(Hétéroptère, Rhopalidae, Liorhyssus hyalinus, Vaucresson, 12 avril, 9h)


(Punaise diabolique ou Halyomorpha halys, Vaucresson, 16 avril 10h 20)

vendredi 17 avril 2020


Pour adoucir la nuit, et le jour


(Zilla diodia ou Diodie tête-de-mort, Vaucresson, 16h 30)

Il y a quelques jours au moment de m’endormir je vis se dessiner un visage sur le noir de mes paupières closes. Je ne dormais pas encore, je cherchais le sommeil, et il y avait ce visage. Un sage, un chaman, une divinité, je ne sais pas, il m’était inconnu, mais j’étais convaincu qu’il apparaissait pour adoucir la nuit. Depuis, chaque soir en fermant les yeux dans le creux de mon lit, je l’appelle.
Aujourd’hui je l’ai aperçu auréolé de lumière dans un coin de mon jardin. Il est là aussi pour adoucir le jour.

jeudi 16 avril 2020


L'horizon
Printemps 2020


(Vaucresson, 14 avril, 14h 30)

Sente de la Folie, à huit cent mètres de chez moi, 
l’horizon, et les rideaux tirés.
Un si joli nom pour une maison.

mercredi 15 avril 2020



La montagne sacré


(Vaucresson, 11 avril, 10h 15)

Tourner la clé, le bruit du moteur, sans hésitation.
Tracer dans le désert de Mojave, au son des guitares de Ry Cooder, Paris-Texas.
Couper les chaines ADN dessinées par le vent sur la terre sèche.
Sans illusions. Quand la terre tremble, saloperie autant que bonté se révèlent.
Tracer pour tenir l’équilibre.
Un vieillard s’est endormi au pied d’un cactus.
L’horizon frissonne, lignes floues, mirages.
Nos rêves en spirale sur la montagne sacré,
rouge sur la plaine rouge,
nos rêves mêlés au souffle des anciens,
pour que bougent les montagnes.

mardi 14 avril 2020


Le ciel du jour


 (Vaucresson,  11 avril, 10h 20)

Pour dessiner le ciel du jour
la pointe d’un iris en papillote

lundi 13 avril 2020



Miniatures éphémères
Le clown et le bombyle


(Vaucresson, 12 avril, 9h 20)

Conversation entre un clown et un  bombyle
sur les notions de vide et de plein

(« Le vide tient le milieu entre le néant et la matière... » Pascal)

dimanche 12 avril 2020


Miniatures éphémères
Histoires de confinement


(Vaucresson, 8 avril, 10h 40)

Tentative de téléportation d’un confiné pour rejoindre sa bien-aimée.
( d’après La Mouche de D. Cronenberg)



(Vaucresson, 9 avril, 15h 20)

Sortie avec son animal de compagnie, 
verbalisée pour dépassement du temps réglementaire.

samedi 11 avril 2020



La chute d'une goutte d'eau sur une petite fourmi


(Vaucresson, 7 avril, 9h 45)

C’était le vingtième jour, la veille il avait plu toute la journée. Je suis descendu  tôt au jardin, respirer le mouillé, pister la lumière dans les perles d’eau. Sur une marguerite mauve, se promenait une petite fourmi. Je suis resté une éternité avec elle. Je me demandais quel effet faisait la chute d’une goutte d’eau sur une petite fourmi.

vendredi 10 avril 2020


Le tour de la terre


(Vaucresson, 7 avril, 14h 30)

Il est  difficile d’envisager l’avenir, et pourtant le ciel est singulièrement clair.
Nous avons tracé un cercle de un kilomètre de rayon autour de notre maison, kilomètre réglementaire pour les sorties autorisées.
Nous sortons marcher une heure chaque jour.
Nous respectons les consignes, une heure, un kilomètre. Nous nous autorisons parfois un écart d’à peine une centaine de mètres ou quelques minutes, comme des enfants désobéissant.
Chaque fois que nous croisons quelqu’un, et c’est rare, nous nous écartons, nous nous saluons à distance. La distance semble nous rendre plus attentifs les uns aux autres.
Je redécouvre ma ville, mon village, neuf mille habitants, de nombreux jardins, des bois, actuellement interdits d’accès.
Aujourd’hui nous sommes passé par ce sentier coincé entre l’autoroute et les maisons. En regardant droit devant, on ne voit que le chemin, les arbres et le ciel.
Et je me prends à imaginer des hordes de chevreuils sur l’autoroute délaissé, partout des coquelicots tachant de rouge le bitume fissuré.
Et ce chemin qui ne finit pas, qui fait le tour de la terre, une terre sans barrières, où les portes des maisons n’ont pas de clés.

jeudi 9 avril 2020


Pour nos morts


(Vaucresson, 8 avril, 11h 05)

Jusqu’à la fin elle dansera, 
pour nos morts.

mercredi 8 avril 2020


Vingt et unième jour


(Vaucresson, 7 avril, 20h)

Au vingt et unième jour
la lune sort du bois

mardi 7 avril 2020


Petit à petit


(Vaucresson, 10h)

Elle a mis sa plus belle robe
soie mauve, soie sauvage
petit à petit
elle se déboutonne
j’ai tout mon temps

lundi 6 avril 2020


La lune, le magnolia et le rouge gorge


(Vaucresson, 4 avril, 17h 30)

La lune, le magnolia et le  rouge-gorge.
C’est le titre d’un livre où le héros ne parle pas, il attend, seul, immobile, sur un banc, dans un jardin, il attend depuis longtemps,  sa barbe et ses cheveux poussent.
Dans le livre beaucoup de pages sont blanches, il ne se passe rien.
À la page deux:
Impossible de me concentrer sur quelque tâche que ce soit. Je m’assois et j’attends.
À la page douze:
Quand j’étais enfant, parfois je me levais la nuit, inquiet, persuadé d’entendre pleurer un bébé abandonné dehors. Je ne voyais jamais rien par la fenêtre et mettais du temps à me rendormir.
Ce n’est que très tard que j’ai compris que ces gémissements étaient les miaulements des chattes en chaleur. Ce soir, j’entends à nouveau ces miaulements. Il n’ y a aucun bébé abandonné dans le jardin, l’air est doux, deux chats sont immobiles face à face au pied du lilas. Il y a si longtemps que je n’ai pas entendu ces miaulements de printemps.
À la page vingt deux:
Un homme et une femme se dispute sur le balcon d’un immeuble voisin, j’ai peur que l’un des deux ne bascule dans le vide.
À la page trente deux:
Il ne pleut toujours pas. Le parfum de l’air a changé.
À la page quarante deux:
C’est samedi, j’ai appelé ma mère, elle se buvait un petit Whisky. Elle est toujours vivante, elle a quatre vingt quinze ans.
À la page cinquante deux:
Le voisin repeint ses volets. Ses enfants l’aident, trois petits qui mettent de la peinture partout.
Le pépiement de ces enfants est un baume quotidien comme l’est le chant des oiseaux.
À la page soixante deux:
Je constate que j’écris sur chaque page dont le nombre finit par le chiffre deux. La batterie de mon téléphone est épuisée.
À la page soixante douze:
Jamais je n’ai vu autant de mouches, moucherons, abeilles, guêpes, bourdons et autre insectes volants dans le jardin. J’entends la sirène d’une ambulance.
À la page quatre vingt deux:
Je suis en colère.
À la page quatre vingt douze:
Un pétale tombe à mes pieds, j’entends chanter un rouge gorge, je tourne la tête, je vois l’oiseau, je vois la lune, c’est une belle journée.
À la page cent deux:
Je n’entends plus les enfants. Je ne me lève plus pour pisser.
À la page cent douze:
Il y a une termitière au centre du jardin. C’est étrange.
À la page cent vingt deux:
Les feuilles de l’érables sont rouges vif. Un avion est passé.
À la page cent trente deux:
Je crois qu’un oiseau a fait son nid sur ma tête. Je me demande si c’est un rouge gorge ou une mésange.

...


dimanche 5 avril 2020


Miniatures éphémères


(Vaucresson, 24 mars, 11h 15)

Sorties clandestines


(Vaucresson, 1er avril, 10h 45)

samedi 4 avril 2020


Hommage


(Vaucresson, 3 avril, 17h)

Le berlingot
le bouton
le haricot
le bonbon
le flageolet
la cliquette 
la framboise
la praline
le bijou
le rubis
la friandise
le dormeur du val

vendredi 3 avril 2020


L'horizon


(Vaucresson, 27 mars, 10h 30)

Ce matin, je cherche l’horizon,
comme on cherche ses lunettes.

jeudi 2 avril 2020


Miniatures éphémères


(Vaucresson, 11h)

Le chant d’un marin à terre

mercredi 1 avril 2020





(Vaucresson, 10h 20)

J’ai connu une femme qui avait la peau si fine qu’on voyait battre son cœur.