samedi 19 avril 2025

 

L'escargot

(Vaucresson, 17h 50)

Il était déjà là hier, l’escargot sur l’érable du Japon, je ne l’ai pas vu monter, il est bien haut l’escargot, à deux mètres du sol au moins. Que cherche-t-il? les feuilles sont intactes. Je reviendrai demain voir s’il est monté plus haut.

vendredi 18 avril 2025

 

Fougère

(Vaucresson, 16 avril,15h 25)

Je prendrai le temps de voir 

Se dérouler la fronde encore en crosse 

Plantée dans l’herbe comme la canne du vieux 

Je verrai chaque penne se déployer 

une à une comme autant de nouvelles rencontres

Et la feuille s’ouvrira

Arbre généalogique mâtiné d’amitiés

Je prendrai ce temps

jeudi 17 avril 2025

mercredi 16 avril 2025

 

Les mousses

(Forêt de Rambouillet, 23 février, 13h 55)

Lu ce matin dans Libération une  interview d’Olivier Liron à propos de son livre L’éloge des mousses aux éditions Rivages:  

Avec ce livre, j’ai voulu me faire le porte parole de ces végétaux si discrets, peu spectaculaires de prime abord mais merveilleux, donner envie de les découvrir, de les aimer, de s’y attarder. Cela peut nous faire beaucoup de bien. Dans un monde où on ploie sous les oppressions, les servitudes, elles offrent la possibilité très concrète de la douceur.




mardi 15 avril 2025

 

Suzanne

(Arboretum de Chèvreloup, 4 avril, 14h 50)

Elle s’appelle Suzanne. Elle vient de claquer la porte de chez elle en hurlant: Tu vas voir si j’existe pas! Elle porte une robe rouge, un manteau noir au col d’astrakan, des bottes à hauts talons, et un petit chapeau orné d’une fleur blanche au côté. Elle marche fière et branlante sur ses hauts talons, l’oeil au beurre noir. Devant elle s’ouvre un champ couvert de fleurs rouges, un saxophoniste joue une danse frénétique, Suzanne se met à courir, elle court, elle rit aux éclats, elle court de plus en plus vite, dessine des cercles dans le pré, s’arrête brusquement devant le musicien, s’évanouie et tombe de tout son long.

Cette scène était la première apparition de Suzanne dans le spectacle On a marché sur la terre crée avec François Cervantes et la compagnie l’Entreprise en 1992, Suzanne sortie de mon imagination que j’interprétais avec une fougue nécéssaire. Le saxophoniste était Akosh Szelevényi.

Suzanne fait partie de ces personnages  nés d’improvisations qui vivent au delà du spectacle qui les a vu naître. Ils s’en vont, ils ont leur vie propre. Je pense souvent à eux, parfois je les retrouve ou je reçois de leurs nouvelles comme ce jour devant ce Cognassier du Japon.

lundi 14 avril 2025

 

Écran brouillé

(Forêt de Rambouillet, 23 février,13h 55)

J’avais un oncle médecin qui exerçait dans une petite ville  de province. Son cabinet était contigu au logement. Je venais souvent dans cet appartement voir mon cousin avec qui nous faisions les quatre cents coups. La plus part du temps mon oncle était assis dans son canapé devant un écran de télévision grésillant, flou, ou présentant la mire. À cette époque, il n’y avait aucune émission l’après-midi, les programmes démarraient en début de soirée. La clientèle se faisait rare chez mon oncle, alors il attendait, devant son téléviseur. Chaque fois je me demandais comment cet homme  pouvait rester ainsi immobile devant cet écran crépitant de gris. 

Peut-être était-il tout simplement devant sa télé comme je suis, des années plus tard, immobile au bord de l’étang, fixant pendant des heures la surface brouillée par la bise, attendant patiemment qu’il se passe quelque chose d’extraordinaire?

dimanche 13 avril 2025

 

Miniatures éphémères

(Feucherolles, Yvelines, 6 avril, 15h 25)

Le cercle

samedi 12 avril 2025

 

L'érable negundo ou l'érable Giguère ou l'érable du Manitoba

(Arboretum de Chèvreloup, 4 avril, 14h 30)

Sur mon chemin,  un vieil érable du Manitoba au port ample et élégant. Les Cheyennes brulaient son  bois comme encens pour la danse du soleil, les Dakotas utilisaient son charbon de bois pour leurs peintures rituelles. Ce sera parfait pour faire la sieste.

vendredi 11 avril 2025

 

Le Sacre du Printemps

(Arboretum de Chèvreloup, 4 avril,15h 40)

Sur l’autre rive, aussi immobile que cette femme en blanc, je regarde venir le printemps. Je vois frémir les bourgeons, à la pointe des branches de jeunes feuilles se déroulent et s’étirent, j’entend éclore les fleurs une  à une, il y a des arbres impatients, tandis que d’autres prennent leur temps, déjà les  oiseaux paradent. Et la femme se lève, déploie ses bras, ses jambes, branches fleuries de blanc, elle va sur l’herbe, sur l’eau, sur le ciel, sur les arbres, elle va rejointe par d’autres, hommes, femmes, oiseaux, vêtus de  blanc, ils vont en chœur ignorant la  gravité, sur la musique d’Igor Stravinsky.

jeudi 10 avril 2025

 

The future is unwritten

(Place Igor Stravinsky, Paris 4 ième, 14h 30)

Il y a une école juste à côté de la fontaine Stravinsky. Au beaux jours, les enfants y sont à l’étroit pour les récréations et les activités sportives, alors ils viennent courir autour de la fontaine crée par Jean Tinguely et Niki de Saint Phalle. Je lézardais au soleil, décryptant les fresques murales, quand un coup de sifflet a retenti et une cinquantaine de gamins en tenue de sport se sont lancés dans une course joyeuse autour du bassin. Non, l’avenir n’est pas écrit…

mercredi 9 avril 2025

 

Serre moi la pince

(Arboretum de Chèvreloup, 4 avril, 15h 10)

C’était un drôle d’arbre un peu tordu, couvert d’excroissances. À son sommet de maigres branches et de petites feuilles vert tendre le disait toujours vivant. L’une de ses protubérances se tendait vers moi comme une serre de rapace. Ne crains rien, me dit-il, je ne suis pas un mauvais gars, je suis juste pas comme y faut, pas dans les normes, une gueule cassée qui garde l’espoir dans ses bourgeons, vient et serre moi la pince.

mardi 8 avril 2025

 

Champignon bois

(Feucherolles, Yvelines, 16h 05)

Ciel clair, forêt en bataille 

À grand pas dans la broussaille. 

Si le temps tourne, j’irais m’abriter 

Sous le champignon bois

Je sais me faire discret

Quand il le faut

lundi 7 avril 2025

 

Débardage

(Feucherolles, Yvelines, 6 avril, 15h 45)

L’eau stagne dans  les ornières  creusées  par le tracteur.

L’homme coupe et débarde. 

Les arbres qui laissent leur image dans les flaques resteront debout.

dimanche 6 avril 2025

 

Miniatures éphémères

(Arboretum de Chèvreloup, 4  avril, 16h 15)

Sur le seuil

samedi 5 avril 2025


Le premier de nous deux... 

(Arboretum de Chèvreloup, 4 avril, 15h 50)

Qui de nous deux  a vu l’autre le premier?

Nous sommes immobiles.

Le lézard épouse le bois.

Je suis à  quelques centimètres, la main qui s’apprêtait à caresser la mousse suspendue au dessus du reptile.

Figés l’un et l’autre. Les yeux dans les yeux.

Le premier de nous deux qui bougera…

Ma main a frémi, un réflexe microscopique, et  le lézard a filé  dans la gerce  noire.

vendredi 4 avril 2025


Cerisier

(Arboretum de Chèvreloup, 15h 35)

Ce monde imparfait

Mais pourtant recouvert

De cerisiers en fleurs


(Issa) 

jeudi 3 avril 2025

 


(Forêt de Rambouillet, 17 février 2024, 14h 25)

Pause sur un bout de bois mort

mercredi 2 avril 2025


Une route

(Sur la route entre Lunax et Aussos, de la Haute-Garonne au Gers, 1er avril,10h)

Dimanche au Puits-Avril, lundi à Montgaillard-sur-Save, mardi au Bourdieu, je vais sinuant d’un bout à l’autre du pays, les poches pleines de vent et de mots. Parfois je fais un écart, je vais où personne ne m’attends, je suis une route simplement parce qu’elle m’appelle, qu’elle me conduit  à ce qui me fait. Je suis là, dans cette ferme, entouré d’hommes, de femmes et d’enfants au yeux de monts et prairies, nous jouons nos rêves aux osselets tandis que des vaches brunes soufflent bruyamment dans l’étable mitoyenne. Je suis là dans une grande pièce imprégnée du parfum de l’âtre, je suis déjà là alors que je viens à peine de bifurquer.

mardi 1 avril 2025

 

Miniatures éphémères

Pour le 1er avril

(Awala-Yalimapo,Guyane, 28 mai 2023, 17h 50)

Pêcheur d’avril


Poisson avril poisson coco

Blanc-manger coco-poisson



lundi 31 mars 2025

 

Un tapis de jeu

(Le-Puits-Avril, Aillant-sur-Tholon,Yonne, 7h)

7h au Puits-Avril

Le soleil s’ébroue

La prairie a la couleur d’un tapis de jeu

Je prends la route

Convaincu d’avoir les bonnes cartes en main

dimanche 30 mars 2025


Miniatures éphémères

(Vaucresson, 29 mars,11h 50)

Entre les gouttes 

samedi 29 mars 2025

 

Fleurs

(Vaucresson, 11h 35)

Le bleu des jacinthes

Et leur ombre

Portent au jardin

Une pincée mélancolique

La grâce des jonquilles

Ajoute élégance et retenue

Le jaune des forsythias

Rayonne tout autour

Tandis que les primevères

Déposent leurs couleurs

Où bon leur semble

jeudi 27 mars 2025

 

Cachée

(Parc de Saint-Cloud, 15h 25)

Cela venait de  derrière l’arbre le plus haut, un gémissement, une plainte, un son humain sans doute, difficilement identifiable. Je me suis approché, à pas de loup, j’ai découvert alors adossée au tronc une petite dame aux grands yeux ronds, rouge de confusion, retenant un fou rire la main sur la bouche, une petite dame qui m’a fait signe de m’éloigner en disant: Chut… Je suis cachée.

 

Racines

(Parc de Saint-Cloud, 15h 45)

Il y avait un vieil arbre, un pin maritime au large tronc. Un vieil homme s’est approché. Il s’est adossé à l’arbre, il a croisé ses jambes, un bras derrière la tête, l’autre le long du corps, la main à plat sur l’écorce, et il a parlé, on ne sait pas à qui, à l’arbre, aux herbes, aux fleurs, au vent, aux bourdons, il racontait sa vie, depuis le début, dans une clinique de Dakar où il naissait tranquille tandis que sa mère buvait une coupe de champagne pour accélérer le processus. Il a raconté ses premiers pas à Ngor  avec une tortue, il a raconté des courses effrénées sur le pont d’un paquebot qui s’en allait vers la France, il a raconté le jardin du grand-père avec la tonnelle de fer, les framboisiers, le parfum des pavés humides dans l’arrière cour, il a raconté son premier vélo, un  bleu avec des capsules de plastique colorés coincés dans les rayons, il parlait vite, parfois laissait un grand silence, reprenait en arrière, faisait un saut  dans le temps, s’emberlificotait, tournait sur lui-même, s’allongeait en fouillant sa mémoire, comme s’il fallait cueillir les souvenirs aux plus hautes branches, le parfum de l’herbe fraîchement tondue se mêlait à celui de la bouse de vache, des pins, des platanes et des feux de jardins, le caquetage des poules accompagnait les sonnailles et les aboiements, il parlait des femmes, il en parlait avec passion, avec tendresse,  d’une plus que les autres, qui avait les pieds froids mais si jolis, des parfums encore, de ceux qui ensorcèlent, comme les voix, au réveil quand tout est possible, il parlait des trains, du tacatac, des roues qui grincent au freinage, il parlait des aubes pâles, des couchers de soleil sur la mer et de la forêt primaire, il virevoltait, montait, d’arabesque en arabesque, parfois tout venait d’un coup, alors il bégayait et souriait aux anges.

Il avait tant à dire qu’il prit racines et devint glycine, enroulée au pin maritime. Et bientôt la glycine fleurira.

mercredi 26 mars 2025

 

J'y vais, j'y vais pas

(Bidart, 18 mars, 16h 20)

J’attends, ils attendent, les surfers dans l’eau, l’homme sur la plage. Vent du sud, une mer parfaitement lisse, une vague tous les quarts d’heure, une vague qui se fait attendre, mais parfaite, creusée par le vent d’autan. J’y vais, j’y vais pas, la vague est belle mais rare, de plus en plus rare  à mesure que monte la marée. À trop hésiter, le temps passe, la marée haute absorbe ce qu’il reste de houle, l’homme sur la plage fait demi tour et les derniers surfers regagnent la plage en ramant. Je me détourne alors de la mer pour flâner sur le sable en  quête de bois flottés aux formes inspirantes. Cette plage est une mine d’or en hiver. Quelques bois flottés pour fabriquer des grigris contre l’obscurantisme ambiant.

mardi 25 mars 2025

 


(Vaucresson, 15 mars, 10h)

Le jardin est en fleurs  quand le monde est en peur

lundi 24 mars 2025

 

La route de la Corniche

(Socoa, Route de la Corniche, 20 mars, 18h 45)

C’est un jour tranquille, la mer au repos et le ciel à peine gâché. Un jour où les catastrophes sont pour l’autre bout du monde. Soudain la terre glisse, la falaise s’effondre, la route suit, irrémédiablement, la route de la corniche, elle tombe, la route des amoureux, elle glisse et se fissure. Une décapotable vert émeraude est emportée vers la mer, au ralenti, une femme s’accroche au volant, un foulard de soie se détache et s’envole. Quand la voiture aura sombré, il ne restera que la tache de couleur du foulard sur la mer.

Non, ça n’arrivera pas, la route aura été fermée depuis longtemps. Aucune voiture quand la route disparaitra. Car elle va disparaitre, dans dix, trente ou cent ans, on ne sait pas, mais la mer et les pluies auront raison des falaises. Les amoureux iront plus haut.

dimanche 23 mars 2025

samedi 22 mars 2025

 

Une éponge

(Étang de Saint-Cucufa,15 mars, 16h05)

C’est une éponge. Hier il a croisé le regard triste d’une vache immobile sous la pluie, il a passé la journée de la glaise accrochée aux bottes et au cœur, aujourd’hui il a aperçu un canard mandarin sur une branche à fleur d’eau, il s’est dandiné toute la journée en saluant tout le monde.

vendredi 21 mars 2025

 

Gigi

(Tartas, Landes, 7h 05)

Gigi dort encore

a cauchemardé

Ça cognait sur la tôle

est tombé de sa couchette

a cru que c’était la troupe

On venait le reprendre

On change pas de vie comme ça

Croyait qu’il y avait droit

Une seconde chance

Comme on dit

On le dit, mais c’est du pipeau

T’as pas droit à l’oubli

Quand t’a fait une connerie

Il a refait sa vie

Il a un boulot, un camion

Et un môme qui l’attend

Un môme qui crie papa

Quand il revient

Dieu que ça fait du bien

Mais là ça tape sur la tôle

C’est les cognes

Sont jamais rassasiés ceux là

Gigi fait un bond

Bascule de la couchette

Se réveille en tremblant

Sait pas si c’est de la peur

Ou de la rage

Putain c’est rien mon gars

C’est la pluie dru sur la caisse

C’est la pluie chaude sur le camion neuf

C’est rien, tranquille

C’est une course comme une autre

Y a le fiston qui t’attend

Rendors toi

Tu repartiras quand il fera jour

Quand la pluie aura cessé