Ça commencera comme ça
(Musée Guggenheim, Bilbao, Pays Basque espagnol, 13h 10)
L’air de rien. Elle sait qu’il est là, il sait qu’elle est là, 195° d’un côté, 165°de l’autre. Il va tourner, discrètement, l’air de rien. Dans le sens des aiguilles d’une montre, c’est plus court mais il y a le sac qui fait rempart, dans l’autre sens c’est plus long mais on a le temps de voir venir, de rester ou de partir, de penser à ce que l’on va se dire et à l’arrivée les épaules se touchent. Il ira donc à l’inverse des aiguilles d’une montre. Quand ils seront si proches que le bleu et le rouge de leurs vêtements se marieront, c’est elle qui parlera la première. Chacun son tour, lui a bougé, c’est donc à elle de parler. Elle parlera de l’exposition du moment, Hilma af Klint dont les grandes toiles colorées explorent les forces et structures de l’invisible. Couleurs et géométrie. Il se taira, écoutera, sentira vibrer son épaule. Puis ils laisseront agir le silence. Quelque chose d’inattendu se passera. Le canapé circulaire sur lequel ils sont assis tournera comme un manège, de plus en plus vite, du moins en auront-ils la sensation, alors il faudra se tenir l’un à l’autre pour ne pas chuter, il faudra s’étreindre. Ça commencera comme ça.