Le palmier électrique
(Hendaye, 12 août, 21h 30)
Ce fut d’abord une vision d’apocalypse, des éclairs zébrant le ciel, jusqu’à la pointe de chaque mât, et sur le ponton de bois un marin aux yeux exorbités, les cheveux dressés sur la tête, fuyant Cthulhu.
Puis ce fut celle d’un pochetron des mers du sud hurlant et titubant, boxant les palmiers en les accablant de toute la connerie humaine.
Je leur aurais trouvé des noms à coucher dehors, des noms de marins qui n’ont pas droit au repos, dont les bateaux prennent l’eau, des marins sans pays qui courent depuis si longtemps qu’ils ont oublié pourquoi ils ont pris la mer.
Et puis dans la douceur du soir, alors qu’il n’y avait plus un souffle de vent pour faire chanter les haubans, j’ai laissé mes deux gabiers sur un banc avec une bouteille, des cigarettes et une carte de L’Île au Trésor.
J’’ai pensé à ce livre offert par mon oncle Pierre que je garde précieusement depuis ma plus tendre enfance, La Craie Magique de Hopp Zinken. Un petit garçon trouve une craie qui fait exister ce qu’il dessine. Il se dessine un ami, il dessine une porte qui le conduit dans un ailleurs merveilleux, il rencontre une reine qui a un jardin sur la tête….
J’ai pensé à ces expériences électrostatiques au Palais de la Découverte où les enfants rient de se voir les cheveux dressés sur la tête…
J’ai pensé au rire de notre petit fils…
J’ai dessiné un bateau électrique barré par un capitaine palmier pour s’envoler au dessus des mâts, pour voir son reflet tout au fond de l’eau, pour se perdre dans la voie lactée où dans chaque étoile il y aurait un bout de nos vies.
Et j’ai donné la craie aux deux matelots.
Remarkable--- A story that is childlike, but full of adult thoughts and terrors.
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