Les Amis
Ce sont trois amis. Ils se connaissent depuis le collège. Ensemble, ils ont fumé leurs premières cigarettes et connu leurs premières ivresses. Adolescents ils allaient en bande danser dans des caves aménagées. Ils caressaient les nuques des filles au son de « It’s a man’s World » de James Brown. il y en avait toujours un qui était amoureux d’une fille qui elle même aimait l’un des deux autres. Ce n’était jamais grave.
Ils partageaient leurs lectures. Pour l’un c’étaient des romans d’espionnage dont toutes les pages chaudes étaient cornées, pour le deuxième c’était Lautréamont, Artaud ou Bernard Noël, pour le troisième c’était Karl Marx.
Ils ont laissé pousser leurs barbes et battu le pavé en hurlant contre la loi Debré.
Ensemble, ils ont fait leurs premiers grands voyages. Ils ont dormi dans des gares en Italie ou sur des plages en Grèce. Ils se sont perdus dans la foule à Belgrade puis se sont retrouvés à Thessalonique.
Ils ont aimé, se sont aimés, se sont vu aimer.
Petit à petit chacun a tracé sa route, des chemins bien différents, mais ils se retrouvaient, régulièrement. Quand l’un restait silencieux trop longtemps, on s’inquiétait.
les mariages, les enfants, les séparations, les déménagements, les carrières, jamais rien ne les a désunis.
Et maintenant, à soixante ans, un âge où soulagé de ne plus avoir la charge de ses enfants, on doit alors prendre soin de ses parents, ils se retrouvent là sur ce banc. L’un vient de perdre son père, un autre a perdu le sien il y a quelques années, et le père du troisième est mal en point.
Ils sont là face à l’océan et ils parlent de leur pères, de leurs racines…
(Pour Gilles et Jean Philippe)
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