mardi 7 juin 2022


Chayton, le faucon

(Sainte-Cécile-Plage, Camiers, Pas-de-Calais, 19 mai, 21h40)

Les nuages vont dans un sens, le porte-conteneurs dans l’autre.

De la Manche à la mer du Nord, par mer calme.

Prochaine escale Rotterdam.

Et le nuage noir s’en va vers l’ouest.

Qui a entendu parlé d’un indien Lakota  de la réserve de Rosebud engagé comme mécanicien sur le Guadalupe?

Les Sioux ne sont pas marins et pourtant.

Chayton a quitté le Dakota, prit la route jusqu’à New-York et s’est embarqué sur un Cargo qui portait le nom d’une mexicaine  croisée un soir de dérive, Guadalupe.

Chayton, le faucon, a pris la mer un jour de printemps.

A fond de cale, les mains pleines d’huile ou éprouvant le roulis du navire sur la passerelle, il n’est plus Le Faucon des plaines qui s’épuise à ne pas choisir entre tradition et modernité.

Chayton le matelot s’en va vers le nord de l’Europe.

À Rotterdam il mettra pied à terre, titubera sur les quais, rencontrera peut-être une autre fille, Betty, Anouk ou Elsie.

Il lui parlera de l’homme blanc qui a sauvé son arrière-grand-père à Wounded Knee.

Un soldat du 7ième régiment de cavalerie, Yngvar, un jeune homme venu de Norvège, qui s’était interposé quand ses camarades voulurent  achever l’arrière-grand-père à peine âgé de vingt cinq ans blessé d’une balle à l’épaule.

Chayton  a entendu cette histoire des centaines de fois. Yngvar et son arrière-grand-père étaient devenus comme des frères.

C’est pour connaître la terre d’Yngvar que Chayton s’en va au nord.

De Rotterdam il continuera par les routes, il marchera autant qu’il peut, il veut respirer cet autre continent. 

Il a l’intuition que le pays d’Yngvar n’est pas si différent, il veut savoir, et pourquoi pas refaire le voyage d’Yngvar.

La nuit vient. Chayton est sur la passerelle.

Dans le ciel, il voit son arrière-grand-père qui revient de Norvège.


 

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