Démission
(Dégrad-des-Cannes, Rémire-Montjoly, Guyane, 6 juin, 8h 40)
Il a eu du mal à l’écrire.
Une lettre de démission.
Il ne suffit pas de le dire, il faut l’écrire, et ça il ne sait pas bien.
Il connait mieux les moteurs que les mots, n’a jamais pu écrire une ligne sans tacher de graisse la feuille.
Cette fois ci, c’est fait. Il débarque définitivement. C’est officiel. Après quarante ans sur les mers, à fond de cale, les mains dans le cambouis.
On disait de lui qu’il avait l’oreille absolue de la mécanique, capable de détecter la panne avant qu’elle n’arrive.
Mais il faut savoir s’arrêter. Surtout quand l’oreille faiblit et qu’on a fait dix fois le tour des mers en répétant les mêmes gestes.
Il est sur le pont, son sac sur l’épaule. Les grues tournent, déjà on décharge les conteneurs.
Il s’en fout.
Le parfum des bois et de la pluie vient jusqu’ici, couvre celui des huiles.
Il regarde le fleuve Mahury qui remonte loin à l’intérieur des terres bordé de ce vert impénétrable.
Il y a tant à explorer.
Et le ciel applaudit.
And so do I! A perfect story, Pierre.
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