lundi 8 février 2016


 Les Larmes de Victor



Victor Langlois, directeur de la Schomsky Pétroleum Company regarde par la fenêtre de son bureau au trente deuxième étage de la tour Franklin. Il est là, planté, les deux mains dans les poches, le regard infiniment perplexe. Derrière lui son bureau est dans un désordre indescriptible.
Il pense à cette histoire que lui racontait son père avant de s’endormir quand il était petit. Sa préférée, il pouvait l’entendre jusqu’à cinq fois de suite.
« Victor était un petit bonhomme très, très curieux. Il voulait tout savoir sur le monde.
Pour vérifier si la terre est ronde, il faut monter haut, très haut dans le ciel.
En ce temps là, les avions n'existaient pas encore.
Alors Victor marchait, interrogeait les passants, et parfois s'arrêtait et pleurait en regardant le ciel.
Comment monter là haut?
Et chaque fois quelqu'un le consolait, lui laissant un mouchoir pour essuyer ses larmes.
Jusqu'au jour où il eut tant de mouchoirs à faire sécher qu’il les noua au dessus d’un feu et en fit une montgolfière… »
Son père a été enterré il y a quelques jours. Tant de choses lui reviennent en mémoire.
Oh oui, il a été un enfant très curieux, très tôt il s’est envolé, et a gravi sans état d’âme les échelons qui mènent à un bureau luxueux au sommet d’une tour de verre.
Peux de temps avant de mourir, son père lui a à nouveau raconté l’histoire de Victor, tout bas, à l’oreille, comme s’il voulait s’assurer que son fils ne l’oublierait jamais.
Aujourd’hui devant sa fenêtre, Victor en cherche encore le sens, mais une intuition lui dit qu’il est encore temps de redescendre et  de prendre une tout autre route…

2 commentaires:

  1. Magnifique ce texte. La photo ne l'est pa moins. Tu passes beaucoup de temps à La Défense dis moi... Ma prochaine publication sera aussi La Défense

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    1. Merci Arnaud. J'y suis allé dimanche faire quelques photos. Ces zones urbaines à l'esthétique flamboyante me semblent très révélatrices de nos contradictions.

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