Burn-out
Le lecteur de code barre ne répond plus, il s’agite dans sa main, semble se jouer d’elle, la conduire à plonger dans la caisse. Il se déploie, avec une puissance extraordinaire, force les doigts à s’ouvrir tandis que là haut l’oeil luisant de la caméra veille. Michelle est seule, clients et caissières ont déserté l’alignement des tapis roulants, toutes les caméras sont braquées sur elle. À l’extrémité de cette perspective, derrière une vitre rectangulaire, dans un bureau aux murs couverts de slogan de guerre, un homme l’observe armé d’une grande épingle. Michelle tremble, son poignet est douloureux, il noircit. Le bip bip du scanner s’infiltre et persiste. Michelle a chaud, puis froid, ses jambes sont soudées, noires et soudées, elle n’a qu’un œil rouge au milieu du front, un front de plastique noir, les acouphènes vrillent son cerveau comme la larve du capricorne creuse l’aubier, maintenant elle est penchée sur le berceau de sa fille, l’enfant pleure, Michelle veut la rassurer, la serrer contre son sein, mais ses bras sont des pattes trop maigres terminées de crochets coupants. Michelle est au dessus du berceau, elle s’élève, légère, blanche à nouveau, vêtue de sa robe de mariée, la chambre s’élargit, sur des rayons, des centaines de bébés étiquetés ricanent, Michelle veut fuir, la voici piquée à l’abdomen, clouée au plafond qui instantanément devient plancher, ses bras, ses jambes, plus rien ne répond, seuls ses yeux roulent dans leurs orbites, elle est dans une boite que Mr Millon, son patron, s’apprête à fermer d’un carreau de verre, Mr Millon l’asperge de naphtaline, au prix d’un effort surhumain Michelle parvient à s’assoir, à saisir le bord de la boite, elle veut hurler mais rien ne sort.
La voici maintenant haletante et frissonnante, assise sur son lit, la main sur l’interrupteur. Son cœur bat trop vite. Dans la chambre d’à coté, Camille, sa fille, appelle.
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