lundi 15 juillet 2019


La maison d'Anatole


(Avignon, 14 juillet, 21h)

Ma maison est un masque de bois clair paré de perles de verre, disait Anatole. Ma chambre fend le ciel, les pigeons roucoulent au cul du bateau. Une rafale a dégondé les volets un jour de grand vent; le bois éclaté sur le trottoir et la lumière qui entre à flots. Le jour à bâbord, la nuit à tribord,
c’est bien comme ça, je vois l’horizon, les vagues de tuiles, les martinets dans le ciel, je vais quelque part, j’avance, disait Anatole. 
Achab est parti, sur le pont supérieur le plancher ne sonne plus, en dessous aussi ils sont partis, Carmen et ses enfants, Carmen et ses chansons, les volets sont fermés, l’escalier est muet.
Anatole ne partira pas, c’est là qu’il vit, au deuxième étage, bien au dessus de la ligne de flottaison, il lui faut un angle pour y coincer ses rêves, il lui faut un coin pour envisager le monde.
Anatole a décollé les étiquettes,  Anatole n’a pas ouvert les lettres, insalubrité n’est pas un mot de mer.
Ma maison est une femme de pierres sèches, disait Anatole, elle s’en ira à grandes enjambées quand viendront les ouvriers.

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