mercredi 25 septembre 2019


L'aventurière de Ty Anquer


(Ty Anquer, Finistère, 15 septembre, 21h)

L’automne est là, fin de saison, plus de distraction, aux derniers reflets Giselle a fermé ses volets,
elle a sorti le plaid en mohair, tons de circonstance, oranges et rouges, un peu de bleu, juste un peu, pour les amours d’été, pour les garder au chaud. Elle a mis ses chaussons, de gros chaussons fourrés à tête de souris, qu’elle tient à l’abri des regards. Giselle est une aventurière, dit-on à Ty Anquer, aux beaux jours elle fait les quatre cent coups, et raconte à qui veut l’entendre ses aventures au bout du monde, pas question de la voir son plaid sur les genoux, les deux pieds chaussés de souris qui dépassent.
Elle s’est assise dans le fauteuil de cuir griffé par le chat, le chat qui gît derrière la maison sous un cairn de galets, le chat écrasé par le camping car d’un retraité maladroit, le chat qui jouait avec ses chaussons avant de se lover sur son ventre, le chat pour qui elle a pleuré trois jours et trois nuits.
Elle a ajusté la couverture de laine. Pas de feu dans la cheminée, le temps est encore clément, le plaid suffit. À côté du fauteuil,  sur une desserte de salon, une lampe au pied de bois tourné et  abat-jour fleuri, une pile de livres, une bouteille de Porto et un verre.
Elle a allumé la lampe, a pris le premier livre sur la pile, Oasis Interdites d’Ella Maillart, l’a ouvert à une page marquée d’une plume de geai, et a commencé à lire à haute voix.
De temps en temps elle s’arrête, ferme les yeux et répète ce qu’elle vient de lire, elle le répète plusieurs fois  comme on ajuste un nouveau vêtement.

1 commentaire:

  1. ... She repeats it several times as one adjusts a new garment. I love that line.

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