mercredi 8 mai 2024


Le Sanglier 

(Parc de Saint-Cloud, 6 mai, 15h 45)

Infatigable coureur des bois le jeune Billy était rentré ce soir là après le coucher du soleil, sa chemise tachée de sang et de terre. 

Ses parents avaient vite compris qu’on ne pouvait rien imposer à ce gamin, il faisait sa vie comme il l’entendait. Il avait très vite acquis leur confiance par son sens de l’observation et ses remarquables capacités d’apprentissage. Ils le laissaient aller et venir où bon lui semblait, leur seule exigence étant qu’il rentre avant la nuit. Souvent, il dormait tout habillé pour pouvoir partir plus vite au petit matin. Au coucher, il voulait bien un baiser, mais pas d’histoire, juste que l’on froisse quelques feuilles mortes à son oreille et il s’endormait aussitôt.

Ce jour là il était sorti dès l’aube emportant le canif  reçu la veille pour ses sept ans. La journée s’était écoulée sans que l’on ne s’en préoccupe. Le père avait coupé du bois, la mère avait mené les brebis au pré puis démoulé les fromages. On n’avait pas vu passer la journée. Alors, à la nuit tombée, après la traite, au moment de se mettre à table, quand personne n’avait répondu au retentissant Billy! du père, on avait commencé à s’inquiéter.  Le père et la mère avait attendu sur le pas de la porte, en se mordant les lèvres, n’osant ni l’un ni l’autre partager leur angoisse.

Billy était arrivé triomphant, l’œil brillant, son couteau à la main, la chemise déchirée. Les parents n’avait encore rien dit que Billy leur raconta avec ferveur s’être battu avec un sanglier géant qu’il avait pisté toute la journée, s’être battu  comme le grand-père à la dernière guerre, plus fort encore, comme le taureau du père Cazaux, plus encore, comme un lion d’Afrique, comme un tigre de Sibérie, comme Aigle Noir et toute sa tribu. Il jura lui avoir coupé la tête avec son couteau tout neuf, une tête trop lourde pour la porter jusqu’ici, et promit de les y mener le lendemain aux aurores.

Billy s’endormit rapidement après son récit. Les parents, eux, eurent du mal à trouver le sommeil.

Au petit matin ils partirent tous les trois vers la forêt, Billy en tête. Il les conduisit loin dans le bois au pied d’une énorme souche à forme de tête de sanglier. 

Voilà, dit-il, voilà la bête. Le corps a été mangé par les loups, la tête est devenue sèche et dure pendant la nuit.

Les parents n’ont pas posé plus de questions, leur confiance restait intacte. Mais ils ont compris que leur fils ne serait pas paysan comme eux, les grands-parents et les arrières grands-parents.

Peut-être bien qu’il sera conteur…

1 commentaire:

  1. It does look like a giant boar's head. We should treasure imagination when it shows up in kid.

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