mardi 31 juillet 2018


Gretel et Hansel


(Puy de Pauliac, Aubazines, Corrèze, 27 juillet)

Voici une lune, et une forêt, puisqu’il n’y a pas de contes sans forêt, pour deux enfants serrés l’un contre l’autre, frissonnant au moindre bruit, aux heures où parle le sous bois.
Une lune et une forêt pour tous les enfants qui ont rêvé d’y abandonner un jour leur petit frère ou leur petite sœur.
Une lune et une forêt pour tous les parents qui ont été avec frayeur effleurés par la pensée  de se débarrasser un jour de leur progéniture.
Une lune et une forêt pour Gretel et Hansel, pour Coralie et Marin qui interprètent si justement les deux enfants dans la pièce de Suzanne Lebeau mise en scène par Marie-Pierre Bésanger.
Une lune et une forêt, une lumière, du noir tout autour, des pensées, des intentions qui bruissent dans l’obscurité, qui écorchent le cœur.
Et au matin, une goutte de rosée pour la larme retenue.

(Pour le touchant spectacle Gretel et Hansel de Suzanne Lebeau mis en scène par Marie-Pierre Bésanger, avec Coralie leblan et Marin Moreau, scénographie Joël Thépault, vu le 28 juillet au festival de la Luzège.)

lundi 30 juillet 2018



Frère et Sœur


( Sur le Jaïzkibel entre Fontarrabie et Pasajes, Espagne, 25 juillet )  

À l’heure où lentement s’efface la frontière entre le ciel et l’océan, un gypaète barbu tourne majestueusement au dessus de l’arbre tenace et solitaire qui a résisté aux vents d’hiver.
Une brise légère dans les fougères, les sonnailles des brebis en contrebas, un homme et une femme plus jeune écoutent en regardant la mer. L’oiseau les observe. L’homme et la femme sont frère et sœur. Ils pensent au père dont ils ont dispersé les cendres au large, un peu plus à l’est.
Ils font connaissance.

dimanche 29 juillet 2018


Miniatures éphémère
Voir naître les libellules


(Exuvie de Libellule, Carrière de Pauliac, Aubazines, Corrèze, 28 juillet)

Papa
emmène moi
voir
 naître les libellules
voler les hirondelles
éclore les coquelicots
marcher les escargots
entendre 
chanter les crapauds
craquer les arbres
couler le ruisseau
fondre la glace
raconte moi
toi

samedi 28 juillet 2018


Le Papillon et la Goutte d'eau


(Argus brun ou Argus de l’Hélianthème, Carrière de Pauliac, Aubazines, Corrèze)

Le soleil se lève à peine
la pluie a cessé
le papillon et la goutte d’eau
ont si peu de temps pour s’aimer
ils s’offriront tout
ne s’épargneront rien

vendredi 27 juillet 2018


Vie


(Bidart, 18 juillet)

Le tranchant du rocher
la douceur de la pente
la puissance de l’eau
au dessus de tout, l’inconnu

mercredi 25 juillet 2018


Repentir


(Hendaye, 24 juin)

Tous ces couchers de soleil sur le Cap  du Figuier, autant de repentirs d’un peintre qui se remet chaque soir à l’ouvrage. Et s’il en était ainsi de nos vies?



 (Hendaye, 22 juillet)


Expulsion


(Bidart, 18 juillet)

Le soleil, le ciel et la terre sont à tout le monde, rumine Wasim que l’on reconduit de force dans son pays, coûte que coûte, je reviendrai.

mardi 24 juillet 2018


Pigeon Vole


 (Hendaye, 22 juillet)

Au jeu de pigeon vole,
souvent le petit Nestor perdait.
Il ne comprenait pas pourquoi.

lundi 23 juillet 2018



Les Matins de Monsieur Jean


(Hendaye, 22 juillet)

Chaque matin monsieur Jean écoute le prélude de l’Or du Rhin de Wagner. Il monte le volume, ouvre ses volets, baille, s’étire, pousse un cri, effectue une série de mouvements de karaté à une vitesse folle. Puis il enfile son short et va doucement marcher sur la plage, les pieds dans l’eau, la bedaine au soleil.

dimanche 22 juillet 2018

samedi 21 juillet 2018


Les jours où la brume s'accroche aux vallons


(Entre Valence-d’Albigeois et Réquista, Aveyron, 8 juin)

Les jours où la brume s’accroche aux vallons, on raconte cette histoire.
Une jeune femme que l’on voulut marier de force à un homme dont la seule qualité était de posséder des terres, s’enfuit  avant la cérémonie alors qu’elle venait juste de revêtir la longue robe blanche signe de son abnégation.
Elle courut sept jours à travers la campagne, s’accrochant aux ronces et aux clôtures, laissant derrière elle des lambeaux d’étoffe immaculée.
Là où le tissu flottait au vent s’élevait une épaisse brume dans laquelle se perdaient les poursuivants.
Lorsqu’elle  atteignit la montagne, elle était presque nue, la peau tannée par le soleil, les muscles endurcis, le souffle large. Derrière, à force de s’égarer dans le brouillard et de se cogner aux arbres on avait abandonné la chasse.
La jeune femme monta jusque là où vivent les ours. Elle prit l’un d’eux pour époux, refusant définitivement  la sottise des hommes.
En été, lorsque les bêtes sont aux pâtures, des bergers disent voir parfois une femme nue aux très longs cheveux courir sur les crêtes.

vendredi 20 juillet 2018


Un petit cimetière


(Saint Cirgue, Aveyron, 6 juin)

Je connais un petit cimetière, sur un promontoire, où chaque soir les morts se lèvent pour jouer aux cartes en buvant du vin de messe. En claquant des mâchoires, ils dissertent des folies de ce monde, parient sur l’avenir des tyrans sanguinaires, sur le débordement des eaux, l’effondrement des berges ou la disparition des papillons. Avant que le soleil ne se lève, ils regardent  l’horizon, se saluent par un check de vieux os et regagnent leurs caveaux.
Au matin, c’est une vieille femme qui s’avance sur les graviers, un bouquet à la main . Elle regarde monter le soleil puis pose les fleurs sur une tombe où pluie et vent ont effacé le nom.
Du plat de sa chaussure, elle lisse le gravier là où les pieds secs des morts ont creusé des sillons.
Un dernier regard sur  l’horizon, et elle s’en va dans sa maison.

jeudi 19 juillet 2018




 (Bidart, 18 juillet)

♪« I’am a poor lonesome cowboy… » ♫

mercredi 18 juillet 2018


À six ans


(Bidart, Pyrénées-Atlantiques) 

À six ans avec une épuisette  
tu attrapes
une baleine
le Mont Fuji
une tortue luth
une armée en campagne
le château de Versailles
un soulier de verre
le soleil, la lune et les étoiles
un poisson rouge
trois coquelicots
et une Cadillac

mardi 17 juillet 2018



Le Bout de la Plage


(Hendaye, 17 juillet)

Le bout de la plage.
Après il y a la Bidassoa, puis l’Espagne, puis l’Afrique.
En face l’océan, derrière, la baie de Txingudi;
Autrefois nous surfions une superbe vague qui se déroulait dans l’embouchure.
Il n’y avait là que du sable et quelques herbes.
De jeunes étrangers s’y ensablaient avec leur combi VW.
Nous fumions des pétards en parlant d’ailleurs.
C’était un point de rencontre, une porte vers le sud.
On y posait son sac à dos pour la nuit avant la grande route.
C’était le lieux de l’initiation  pour de tendres adolescents.
Il y avait aussi les récits des anciens qui parlaient de barques abandonnées par des réfugiés,
déjà.
Le soir on regardait rentrer au port les bateaux de pêche les uns derrière les autres.
Là où se trouve maintenant le port de Sokuburu et quelques immeubles, il n’y avait qu’un café, un bâtiment arrondi, au milieu des pins et du sable, L’Embata, du nom de ce coup vent local qui s’annonce toujours par une barre de nuages sur le Jaïzkibel, la montagne qui domine la baie à l’ouest côté espagnol. S’y retrouvaient les surfeurs avec leur skate les jours sans vagues. Quand nous étions enfants, ma grand mère nous y conduisait parfois. C’était soir de fête, nous nous régalions d’un hot-dog accompagné d’un chocolat chaud ou d’un Coca-Cola. Un hot-dog au bout du monde, quelle aventure!
La vague sur la Bidassoa a disparu, plus rien de sauvage tout autour. Mais cela reste le bout de la plage, là où les couchers du soleil qui disparaît lentement derrière la montagne sont les plus beaux, là où se rêvent tous les voyages, la où se goutte la solitude, à la frontière, là où change la langue, à la limite de la terre et de l’eau, de la vallée et de la montagne, là où passent les oiseaux migrateurs.
Quand je suis à Hendaye, rares sont les soirs où je ne vais pas au bout de la plage accompagner le soleil.

lundi 16 juillet 2018


Réconfort


(Blayac, Aveyron, 8 juin)

De l’autre côté
quelques coquelicots
tant de réconfort

dimanche 15 juillet 2018

samedi 14 juillet 2018



Une Demoiselle


(Hugiès, Aveyron, 12 juin)

C’est une demoiselle qui danse
un bout de guinde
effiloché au vent
qui me dit
que jamais les clôtures 
ne seront infranchissables

vendredi 13 juillet 2018



Le Départ


(Hendaye, 24 juin)

Il manque à la lune un tout petit morceau, avant qu’elle ne soit pleine. Alors Edmond partira, à pied. Il laissera les voiles moisies à fond de cale, le moteur grippé, les livres humides entassés dans la cabine, tout ce qui fait son quotidien depuis des jours, il laissera le bateau à qui veut le prendre, il ne gardera que le clapotis de l’eau contre la coque et le souffle du vent dans les haubans. Il mettra un vêtement propre et il partira à pied, vers les montagnes. Il partira sans bagage, il marchera aussi haut qu’il pourra monter.

jeudi 12 juillet 2018



Ce qu'il y a après


(Novis, Aveyron, 13 juin)

Elle le suivait depuis si longtemps. Chaque fois il disait: allons voir là haut ce qu’il  y a après. Il y avait alors  un autre col, un autre virage ou un autre sommet. À nouveau il disait: Allons jusque là-bas, après on redescend. Le chemin continuait, encore un col, un virage ou un sommet et il repartait, pour voir ce qu’il y avait après.
Elle, chaque fois, se disait: c’est la dernière fois. mais elle était toujours là, sur le chemin, avec lui.

mercredi 11 juillet 2018



Le Baiser à la Mer


(Hendaye)

Ce soir la plage a la couleur des souvenirs d’enfance. Le pied laisse dans le sable une emprunte que la marée efface, mais celle que le sable et l’eau laisse sur la peau reste.
Ce matin  nous avons croisé un groupe de jeunes gens autistes et trisomiques regagnant le haut de la plage après la baignade. L’un d’entre eux était resté au bord de l’eau. Il se tenait face à la mer, les bras écartés légèrement en arrière, tout le corps tendu vers l’horizon, le menton en avant, les lèvres lançant un baiser à la mer.

mardi 10 juillet 2018


La roue tourne


(Avignon, Vaucluse, 9 juillet)

C’est une splendide journée de juillet, la roue tourne lentement, de là haut ils aperçoivent le Rhône piqueté de vaguelettes blanches levées par le mistral, le pont d’Avignon qui n’ose pas traverser, presque blanc au soleil, les hauts murs du palais des papes; sur l’autre rive, à Villeneuve-lès-Avignon, la tour Philippe le Bel, fière avant garde, et le fort Saint-André, inexpugnable.
André et Françoise se sont assis très près l’un de l’autre sur la large banquette. Leurs jambes, leurs bras, leurs épaules se touchent. Ils regardent droit devant, le cœur battant de l’urgence à dire je t’aime. À mi course, elle lui prend la main, ferme les yeux et dit: « Il fait bon… »
En bas sous le chapiteau, une fanfare joue la Grande Parade. André regarde Françoise, il voudrait l’embrasser, effleurer cette délicate fossette  qu’on nomme la marque de l’ange, entre le nez et les lèvres. Il ne voit plus que ce creux dans lequel minuscule il s’étend pour couler jusque dans la bouche comme une goutte de sueur. Il dit: « Je…Je…Je… »
La roue tourne, il ne reste plus qu’un quart de tour à André pour déclarer sa flamme. Jamais son bégaiement n’aura été aussi violent.

lundi 9 juillet 2018



Une nuit sans fond


(Travaillan, Vaucluse, 7 juillet)

Autrefois,  chaque matin elle ouvrait les rideaux et regardait loin, par delà les vignes et les cyprès, jusqu’au Ventoux à gauche, aux dentelles du mont Mirail à droite. Elle aimait ce paysage comme son père l’avait aimé. Elle avait plaisir à partager cette vue avec les visiteurs.
Mais lentement sa mémoire s’était altérée, son regard effacé. Elle ne regardait plus au dehors, sursautait au moindre bruit, ne quittait plus son pull de laine, même aux heures les plus chaudes.
Elle était égarée dans une nuit hachée, une nuit où la même question peut tourner pendant des heures, une nuit désertée de toute présence amie.
Mais le pire est qu’elle en avait parfois conscience. C’était alors des déflagrations plus douloureuses que la nuit sans fond.

dimanche 8 juillet 2018



Miniatures éphémères
Carte postale de Provence


( Audionaturaliste et Cicada orni , Travaillan, Vaucluse)

Ksss ksss ksss ksss ksss….

samedi 7 juillet 2018



Sandra


(Sur la D 976 entre Orange et Roquemaure, Vaucluse et Gard) 


Rick roule peinard dans une DS décapotable bleue pétrole que Bill, un pote de Valréas, lui a prêtée.
Bill est un collectionneur de vieilles bagnoles, un mécano hors pair et joueur de banjo qui vit au milieu des vignes  dans une maison branlante, seul le hangar qui abrite les voitures désossées semble en parfait état, un bon gars avec qui Rick fait des bœufs en buvant du côte du Rhône millésimé. Ils se sont connus sur un bac qui traversait le Maroni de la Guyane vers le Surinam.
Ils ont joué ensemble dans un grand hôtel de Paramaribo, l’hôtel Krasnapolsky, Rick à la batterie, Bill au banjo et Sandra, une fille du coin, une saramaca, au piano. C’était pas une formation ordinaire, mais ça sonnait sacrément. Sandra chantait aussi, elle avait une voix grave, une voix parfumée aux pluies tropicales, une voix qui creuse son lit, une voix  de chaman qui swing sous les grands arbres.
À leur retour en métropole Rick et Bill sont restés en contact. Chaque fois que Rick descend dans le sud, ils se retrouvent. Ils improvisent dans le hangar, Rick fait sonner les jantes, les portières et les capots, tandis que Bill raconte la route en grattant son banjo.
Ils n’ont jamais revu Sandra, ni l’un, ni l’autre. Aucune nouvelle. Ils ignorent ce qu’elle est devenue. Ils ont appelé là-bas au Surinam, rien. Aucune trace. Sur internet, aucune trace non plus.
Rick roule piano dans la DS, le soleil tape, le mistral fait tanguer les cyprès.
Soudain il la voit là, sur le fauteuil jaune, le pouce levé, au bord de la route. Elle porte un short en jean et un débardeur vert pomme, l’une de ses jambes repose négligemment par dessus l’accoudoir, de longues jambes noires, son imposante coiffure afro se confond avec le vert sombre de la végétation. Sandra. Elle le regarde, elle sourit. Il est stupéfait, il s’arrête, le gravier crisse sur le bas côté. Il descend de la voiture. Elle n’est plus là. Personne. Il cherche, derrière les arbres, regarde à droite, à gauche sur la route, personne.  J’ai du rêver, se dit-il, faudra que je parle à Bill du côte du Rhône d’aujourd’hui.
Il reprend la route. Un kilomètre plus loin, la voiture qui le suivait juste avant qu’il s’arrête est encastrée dans un camion qui roulait à contre sens.
Il s’arrête à nouveau, son cœur bat à cent à l’heure, il ne bouge plus, agrippé au volant. Il réalise que les fauteuils jaunes sur le bord de la route étaient exactement les mêmes que ceux des salons de l’hôtel Krasnapolsky.

vendredi 6 juillet 2018


D'aplomb


(Hendaye, 23 juin)

Il me faut parfois tout ranger, faire le ménage de fond en comble. Plus un grain de poussière sur les étagères, chaque chose à sa place, au millimètre près. Alors seulement je me sens d’aplomb.

jeudi 5 juillet 2018


Demi-Diable


(Saint-Cirgue, Aveyron, 3 juin)

C’était en fin d’après-midi, après une journée harassante, je marchais au ralenti sur une pente envahie de ronces et de chardons, à quelques mètres du mobil-home où je logeais. Je regardais avec attention tout autour sans rien chercher en particulier, si ce n’est me dissoudre dans le calme de ces lieux.
Je vois un papillon blanc se poser sur une ronce, je m’approche avec une extrême précaution, le papillon s’envole, je le suis du regard, il revient se poser au même endroit. C’est à ce moment que j’aperçois ce minuscule insecte à quelques centimètres du papillon qui s’envole à nouveau. Quel est cet étrange animal ailé, casqué, cornu?  Je suis fasciné par son aspect. Toute fatigue, toute
inquiétude s’envolent immédiatement. Je reste avec ce monstre aussi petit que merveilleux.
Un mois plus tard je repense à cet insecte, je regarde la photo que j’en ai faite, je cherche son nom. Quand enfin je le trouve, merci internet, il est tard, tout le monde dort. Je ris, un rire carnassier, un rire diabolique. La fenêtre est grande ouverte, je sens les pointes de mes incisives, la puissance de mes muscles, l’air chaud caresse ma poitrine, il faut que je sorte…
Ce petit animal est un « Demi Diable », un Centrotus cornutus, De la famille des membracides.
Hé hé hé hé………

mercredi 4 juillet 2018


Ça va, ça va bien.


(Entre Aubrac et Saint-Chely-d’Aubrac, Aveyron, 9 juin)

Ce jour là il faisait bon marcher. Tout, les arbres, les pierres, les vaches, les nuages, tout avait l’air de dire: Ça va, ça va bien. Sauf une vache, debout, qui me regardait intensément, avec une sorte d’étonnement, comme si j’étais le représentant de toute la race humaine.
Un autre jour, j’interrogeais des personnes âgées dans une maison de retraite. Paulette, cent ans, après avoir raconté qu’ayant perdu son fiancé à la guerre elle avait définitivement renoncé aux hommes, me dit en me regardant droit dans les yeux comme si j’étais le représentant de tous ces messieurs: Quand vous aurez fini de vous entretuer, peut-être que ça ira mieux!

mardi 3 juillet 2018


Quelqu'un qui attend


(Hendaye, 24 juin)

Au dernier rayon de soleil,
il ne reste plus qu’un chien qui aboie
et quelqu’un qui attend.

lundi 2 juillet 2018


Le Parfum du Freesia


 (Freesia, Vaucresson)

Le parfum du freesia
c’est une rencontre dans un théâtre parisien aux murs décrépis.
On y joue Ubu Roi, il déchire les billets aux rez-de-chaussée, elle distribue les programmes au premier étage.
Ce sont des mains qui découvrent la douceur d’une nuque blonde au petit matin tandis que dehors les roues des trains grincent sur les rails du terminus.
C’est un sourire, un geste, Sissy Spacek en équilibre sur les traverses d’une voie désaffectée.
Ce sont des lettres de Natashquan, des lettres que l’on attend, des lettres que l’on dévore, des lettres qui disent ce qui est.
C’est une robe mauve, une robe blanche, une salopette à rayures, des chahuts et des étreintes, dans la neige, dans les herbes, au bout du champ.
C’est une petite fille, si petite  qui souffle dans une flûte à bec en lisant un livre assise sur son pot.
C’est un petit garçon innocent, tellement innocent, qui roule à toute allure sur un  camion de plastique rouge et jaune.
Ce sont des nuits sur la nationale 20, les enfants dorment à l’arrière, les parents sont silencieux, la vie va.
Ce sont des départs, des retrouvailles, des lettres, encore, des coups de téléphone, des joies, des inquiétudes. Jamais de reproche.
Ce sont deux enfants agrippés à leurs parents sous une tente plantée au centre d’une prairie face à des arbres tortueux, lors de leur première nuit en pleine nature.
C’est un visage endormi, un baiser, des baisers, autant de baisers qu’il y a eu et qu’il y aura de jours.
Ce sont deux corps si parfaitement imbriqués qu’ils ont du être conçus l’un pour l’autre.
« Aux marches du palais  il y a une tant jolie fille lonla… »  Ils marchent dans les bois, c’est la première fois qu’il chante, elle lui apprend.
Le parfum du freesia, c’est un petit cordonnier qui ramène un bouquet dans la maison neuve, c’est le parfum d’une chanson, une chanson qui raisonnera encore lorsqu’ils n’auront plus de voix.

dimanche 1 juillet 2018


Miniatures éphémères


(Saint-Cyprien-sur-Dourdou, Aveyron, 5 mai)

Sans titre