Le manguier
(Camp de la transportation, Saint-Laurent-du-Maroni, Guyane, 3 avril)
L’arbre a tout vu, tout entendu.
Il veille au centre du camp.
Un manguier, fier.
Sous l’écorce, les plaintes,
le bruit des chaînes.
Chaque feuille, un nom.
Il suffit de s’asseoir
dans l’ombre paisible,
d’écouter le frisson
sous le vent de mer,
le frisson de l’arbre qui a vu,
pour savoir que jamais
ça ne finira.
Un jour, un homme
a posé son front
contre le tronc.
Il cherchait son frère.
l’arbre a dit les noms.
Un chapelet égrené,
la douceur des billes de bois,
les noms dans la sève.
Et le vent, et les oiseaux,
ont porté d’autres noms,
du Chili et d’Orient,
d’autres noms
dans la sève épaisse.
L’homme s’est détaché
de l’arbre.
Il a vu alors les fruits
charnus comme des bombes.
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