mercredi 30 octobre 2019


L'escalier


(Landévénnec, 8 septembre)

Il marchait lentement, les mains derrière le dos. La mobilité de sa tête dont je ne voyais que la crinière blanche dénotait une grande attention à tout ce qui l’entourait.
Je l’avais vu venir du rivage, sa silhouette m’était familière. J’étais trop loin pour distinguer son visage. La journée avait été grise. En fin d’après-midi les nuages s’écartèrent. L’homme remontait la colline qui surplombe l’Aulne vers la lumière filtrée par les grands arbres. Il s’arrêta près d’un rosier, se pencha sur une fleur, l’entoura de ses deux mains, se pencha un peu plus pour en respirer le parfum. Je ne pus m’empêcher de penser qu’au même instant, en d’autre lieux, un homme amoureux prenait dans ses mains le visage de sa belle endormie pour l’embrasser tendrement.
L’homme reprit son chemin. Il était vêtu d’un caban sombre qui rendait le blanc de ses cheveux encore plus éclatant. Je le suivis, à distance. La délicatesse de son geste me l’avait rendu sympathique. Il semblait m’avoir vu, lorsque je m’arrêtais, il s’arrêtait à son tour. Parfois il cueillait quelques herbes, les écrasait entre ses doigts pour mieux en apprécier les arômes. Il faisait cela en se tournant de trois quart, comme s’il m’invitait à faire de même, sans que je puisse toujours discerner ses traits.
En haut de la prairie, trois sentiers menaient au sous-bois. L’un à gauche, de terre, large et propre, en pente douce, l’autre à droite envahi de ronces, le troisième au centre, dans le prolongement d’un petit escalier de pierres. L’homme fit une pause au pied des marches de granit, puis les gravit avec une extrême lenteur.
Arrivé en haut de l’escalier, il disparut. Simplement, comme ça, soudain il n’était plus là.
J’hésitai longtemps avant de m’engager dans l’escalier…

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