samedi 16 novembre 2019


Le goût de se perdre


(Orval, Belgique, 10 novembre)

Je devais avoir une dizaine d’années. Nous étions partis du petit village de Bareille en Ariège pour rejoindre la grotte d’Aliou d’où jaillit un ruisseau au fond d’un vallon, la Gouarège. Il y avait mes parents, mon oncle Pierre, et moi. J’étais le seul enfant, du moins dans mes souvenirs.
Notre maison  était au bout du village, au bout de la route. De là partait un sentier qui menait au fond d’un autre vallon parallèle au premier. Pour rejoindre la grotte, le chemin le plus court était de gravir à travers bois la colline qui séparait les deux vallées. Mon oncle connaissait le chemin, du moins le disait-il. Nous nous sommes enfoncés dans le sous bois sans hésitation. Très vite les chaos de pierres et les ronciers ralentirent notre progression. Nous avons longtemps tourné dans ces bois denses où les branches crochues et les pierres branlantes semblaient vouloir nous retenir.
Je ne sais plus au bout de combien de temps, la peau égratignée, les chevilles douloureuses, nous avons atteint la cavité et sa résurgence, mais le plus fort de ce souvenir  ce n’est pas cet antre mystérieux où nichent les chauves souris, c’est le chemin semé d’embuches, l’absence de repères, le goût de se perdre.

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