vendredi 3 septembre 2021


Dans le port de Pasajes

(Pasajes, Espagne, 25 août, 22h 30)

Dans le port de Pasajes, il y a un marin qui dort

Il a posé son sac sur un grumier

Ça sent le poisson, la résine et le gasoil

Sa couchette est étroite, ses rêves sont larges et insolents


Dans le port de Pasajes, il y a une fille à sa fenêtre

Elle cherche sa voie dans l’eau noire

C’est une fille de rien, elle a la langue nouée par une sale histoire

Son lit est défait, sa chemise est tachée


Dans le port de Pasajes, il y a une vieille qui attend

Elle ne compte plus les jours, elle a fait son temps

C’est la marée haute, ça clapote sous son crâne

La chaise est usée, la lumière éteinte, ça ne vaut plus la peine


Dans le port de Pasajes, il y a un chien qui veille

Le menton sur les pattes, le regard amoureux

C’est un chien de bateau, un chien de matelot, un chien des tempêtes

Un chien sans laisse, son maître n’est pas très loin


Dans le port de Pasajes,  il y a un enfant qui prie

Il tient le drap serré contre sa poitrine

C’est un enfant qui veut juste devenir grand, plus grand que son père

Son cœur bat trop vite, ses yeux sont immenses


Et puis il y a la nuit, dans le port de Pasajes

La nuit qui étreint, chacun en son cœur, la nuit qui retourne et retrouve

La nuit qui caresse les corps et les navires

Et à fleur d’eau, lents dans la nuit, il y a les poissons chats qui nous regardent 

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