Prendre le vent
(Kourou, Guyane, 27 mars 2019)
C’était il n’y a pas si longtemps.
Il avait poignardé un homme pour une fille trop rousse, pour une fille constellée de taches de rousseur, pour une femme feu, une femme oiseau, une femme montagne, une femme qui n’appartiendrait jamais à personne.
On l’avait envoyé au bagne les fers aux pieds avant même qu’il puisse faire ses adieux.
Il avait passé quinze ans de sa vie, les jours à charrier du bois dans des marécages infestés de moustiques, les nuits enchainé entre quatre murs couverts de salpêtre.
Et puis on lui avait ouvert la porte, ôté les chaines, on lui avait dit: Tu peux partir, par là c’est la forêt, par là c’est la mer mais ne compte pas embarquer pour l’Europe, jamais.
Il a cultivé son bout de terre, il a vécu de menus trafics, il a connu une fille très noire, une femme bois, une femme feuille, une femme fleuve qui jamais n’appartiendrait à personne.
Et tout le temps qu’il vécut sur cette terre de Guyane dont il était à vie imprégné du parfum, chaque jour il vint à la tour Dreyfus, au sémaphore de la pointe des roches, là où le vent souffle fort, il vint chaque jour à la tour prendre le vent face à la mer, dos à la forêt.
À celui qui lui demandait pourquoi chaque jour on le voyait là sur ces rochers, il répondait:
Parce que c’est ici que le vent souffle le plus fort.
My remarks seem repetitive--- But I thoroughly enjoyed the tale and the picture.
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