vendredi 30 octobre 2015


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Hans est maladroit, un peu timide et souvent seul. Il y a quelques jours il s’est assis sur ses lunettes. Alors il fallu en changer. C’était des lunettes pour voir de près, hé oui, c’est qu’il n’est plus tout jeune, Hans. Il a choisi des verres progressifs. Il les gardera sur le nez, cela lui fera des économies. Et ce léger flou sur les cotés n’est pas si désagréable, lui change sa manière de voir les choses. Il a aussi choisi des montures Ray-Ban, parce qu’il aime l’Amérique et les routes toutes droites avec les boules d’herbes sèches qui roulent dans le vent du sud. A quinze ans il avait un poster de Easy Rider punaisé au dessus de son lit.
Ce matin, il était au musée Van Gogh. Il y vient dés qu’il fait gris. Il y a un tableau qu’il aime plus que les autres. C’est une peinture de la butte Montmartre à Paris en 1887. Un ciel tourmenté, au sommet de la butte un moulin, des champs qui descendent, verts, plusieurs nuances de vert avec des taches claires, et en bas à gauche deux silhouettes côte à côte, noires. On distingue un troisième personnage, flou, quelques centimètres à droite au dessus  du couple.
Ce matin, il est resté longtemps devant le tableau. Plus longtemps que d’habitude. Il le redécouvrait. Plus il s’attachait aux détails, plus l’émotion grandissait, une profonde mélancolie.
Soudain une femme à ses cotés lui a adressé la parole. Elle était là depuis longtemps elle aussi. Une américaine. Avec des lunettes rouges. Elle lui a parlé de la relativité. Le timbre de sa voix était délicieusement rauque. Pour la voir, avec ses nouvelles lunettes, il a fallu qu’il tourne bien la tête à droite. Et la réponse est venue, étrangement fluide, portée par les couleurs du tableau.
Et maintenant, ils sont là tous les deux, hors champ, devant cette vitrine. Ils s’embrassent passionnément au milieux du trottoir…

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