Frissons
(Duravel, Lot)
Dans le jardin du couvent, sœur Angélique cueille des citrons. Il fait chaud, la cornette lui chatouille la nuque, elle sent couler une petite goutte de sueur le long du dos, jusqu’en bas.
Ils sont beaux ces citrons, un peu tachés, mais parfumés, jolis comme de petits seins aux tétons durcis. Angélique sourit béatement. Merveilleuse après-midi de Mai, tout est frisson, les citrons, les iris, les figues, oh encore bien petites, l’orpin blanc, que l’on nomme aussi trique-madame ou petite joubarbe, et le parfum du céanothe, un parfum oh combien humain…
Angélique aperçoit une minuscule sauterelle sur une fleur du citronnier. Elle s’extasie d’abord devant cette merveille de la nature. Seigneur que ne faites vous pas pour nos sens en éveil! Elle regarde de plus près et soudain il lui semble voir le diable. Elle retire promptement la main de dessous son habit, se signe, rajuste sa cornette, s’évente, chassant les pensées comme on chasse les mouches et s’assure que personne ne l’a vue se laisser aller.
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